16/05/25 Black out espagnol, une leçon ? Transition menacée par la fragilité des réseaux : l’Europe doit investir plus de 2.000 milliards de dollars dans son réseau électrique d’ici 2050...
- Vent Contraire en Touraine & Berry
- 16 mai
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L’Europe doit investir plus de 2.000 milliards de dollars dans son réseau électrique d’ici 2050
par La rédaction le 14 mai
Le blackout espagnol doit servir de leçon. Selon la Cour des comptes européenne, il faudra investir dans les 25 prochaines années entre 2.265 et 2.600 milliards de dollars dans la modernisation des réseaux électriques européens. L'électricité est censée devenir l’outil majeur de la transition et sa part dans la consommation d'énergie finale en Europe passer de 23% à plus de 50% en 2050. Mais les réseaux sont incapables d'y faire face. Selon un rapport rendu public le 13 mai et réalisé par Beyond Fossil Fuels, en collaboration avec Ember, E3G et l’IEEFA (Institute for Energy Economics and Financial Analysis), « sans réformes urgentes, l'Europe restera prisonnière d'une prophétie auto-réalisatrice dans laquelle les carburants fossiles resteront indispensables simplement parce que les alternatives n'ont jamais été correctement planifiées ».
Construire une stratégie de transition énergétique en privilégiant les renouvelables intermittents a un coût affiché, les parcs éoliens et solaires, et un autre caché, l’adaptation impérative des réseaux électriques à des productions aléatoires par définition. Le gigantesque blackout dans la péninsule ibérique du 28 avril dernier est venu brutalement le rappeler… Les vulnérabilités des systèmes électriques sont devenues une réelle menace pour les populations et l’activité économique. C’est une chose de voir les cours de gros de l’électricité soumis en quelques heures à des variations considérables et même des prix négatifs, du fait d’une offre provenant des renouvelables intermittents tour à tour surabondante et insuffisante, cela en est une autre de voir des millions de personnes plongés soudain dans le noir.
La situation est d’autant plus préoccupante que des centaines de Gigawatts de capacités de production éolienne et solaire ne sont pas programmés faute d’un réseau pour les connecter. … Selon un document publié par Allianz Research un mois et demi avant la pire panne d’électricité en Europe, « les disparités en matière d’infrastructure électrique et de conception du marché sont devenues des obstacles majeurs à la transition écologique. Les retards dans le développement du réseau ont créé un arriéré de plus de 800 GW de capacité éolienne et solaire en attente de connexion, soit près du double de l’offre actuelle».
La transition menacée par la fragilité des réseaux
Un rapport encore plus récent, en date du 13 mai, réalisé par Beyond Fossil Fuels, en collaboration avec Ember, E3G et l’IEEFA (Institute for Energy Economics and Financial Analysis) va encore plus loin. Selon lui, près de 1.700 GW de projets d’énergie renouvelable (solaire et éolien) ou hybrides (avec stockage) sont en attente de raccordement au réseau électrique dans 16 des 28 pays européens étudiés. Un chiffre tellement énorme qu’il semble improbable. Car cela représente le triple de la capacité de production jugée nécessaire pour atteindre les objectifs climatiques de l’Union européenne d’ici 2030.*** Pour Beyond Fossil Fuels, « sans réformes urgentes, l’Europe restera prisonnière d’une prophétie auto-réalisatrice dans laquelle les carburants fossiles resteront indispensables simplement parce que les alternatives n’ont jamais été correctement planifiées ».
Les décideurs politiques, les lobbys éolien et solaire et les mouvements écologistes ont fait avec succès la promotion des équipements renouvelables intermittents et de leurs capacités à réduire les émissions de gaz à effet de serre.**Mais si les moyens de transporter, de distribuer, d’interconnecter et même de stocker cette électricité restent très insuffisants, les capacités installées solaires et éoliennes peuvent battre sans cesse des records, cela ne sert à rien sauf à dilapider des investissements et des subventions.
Il y a un peu plus d’un an le think Tank Ember soulignait dans un rapport que les investissements dans les réseaux en Europe sont très en retard par rapport à l’augmentation des capacités de production renouvelables. Il estimait lui aussi que la transition énergétique était tout simplement menacée. « S’assurer que le solaire et l’éolien peuvent effectivement se connecter au système est aussi important que les panneaux et les turbines eux-mêmes… Il n’y a pas de transition sans transmission », écrivait Ember.
Investir dans toute l’Union entre 2.265 et 2.600 milliards de dollars d’ici 2050
Des conclusions similaires à celles de l’Agence internationale de l’énergie (AIE). Elle affirmait dans une étude de novembre 2023 que « des milliers de gigawatts d’énergie renouvelable attendent d’être raccordés au réseau… Cela montre que les réseaux deviennent un goulet d’étranglement… ». Elle mettait en garde contre le fait que les investissements en plein essor dans les renouvelables contrastaient avec les dépenses stagnantes dans le monde depuis une décennie de l’ordre de 300 milliards de dollars par an dans la résilience et l’expansion des réseaux.
Selon un document rendu public à la fin de l’année 2023 par la Cour des comptes européenne, les pays de l’Union devront investir entre 2.265 et 2.600 milliards de dollars pour répondre aux besoins des réseaux d’ici 2050. Elle estimait les besoins d’investissement cumulés en Europe dans les réseaux d’ici la fin de la décennie à 660 milliards de dollars. « Une grande partie du réseau électrique de l’UE date du siècle dernier : près de la moitié des lignes de distribution ont plus de 40 ans », expliquait la Cour des comptes. Il faut dire que l’électricité est censée devenir l’outil majeur de la transition et sa part dans la consommation d’énergie finale européenne passer de 23% à plus de 50% en 2050. Et à cette date, les renouvelables intermittents devraient assurer 82% de l’offre dans l’Union. Des prévisions qui n’ont pas grande valeur, mais illustrent les enjeux.
La priorité aux interconnexions transfrontalières
L’UE doit en priorité et impérativement renforcer les interconnexions électriques transfrontalières afin de permettre aux pays d’importer de l’électricité de leurs voisins en cas de besoins urgents. L’UE a relevé son objectif d’interconnexion à au moins 15% d’ici à 2030, contre 10% précédemment. Cela signifie qu’un État membre devra être en mesure d’importer jusqu’à 15% de l’électricité qu’il consomme d’un ou de plusieurs de ses voisins.
Au début de l’année 2025, 14 des 27 pays de l’Union avaient atteint ou même dépassé cet objectif, 5 pays étaient au-dessus du seuil de 10% et 8 autres n’étaient même pas à 10%.
** OUI c’est une réalité quand on passe du charbon, gaz ou lignite au solaire et à l’éolien, ce qui n’est pas le cas en France où ce recours contribue à l’augmentation la production de CO2 par KWh
*** une bombe à retardement pour la sécurité des réseaux et le coût de l’électricité
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