- Intérêt des chauve-souris qui sauvent nos forêts
pas toujours victimes du changement climatique...
Laurent Tillon : "Les éoliennes ont décimé des populations entières de chauves-souris" Entretien
Propos recueillis par Vladimir de Gmeline
Dans un passionnant ouvrage sur les chauves-souris Laurent Tillon, ingénieur à l’ONF, met en garde contre les menaces qui pèsent sur eux. Ce mammifère méconnu, qui compte parmi les plus utiles à la nature, est en effet victime de décisions écologiques qui risquent de mener au dérèglement qu’elles prétendent combattre.
Quand il vient lui rendre visite, il le salue, une main posée sur son écorce, les yeux fermés. Laurent Tillon, biologiste et ingénieur à l’Office national des forêts (ONF), a rencontré Quercus, chêne de la forêt de Rambouillet, alors qu’il n’avait que 15 ans. Il en a 46 à présent, et Quercus à peu près 240. « Je ne sais pas ce que serait devenue ma colère si je ne l’avais pas rencontré »dit-il. Il s’assied contre son tronc, un fauteuil parfait. Ici, l’adolescent qui avait connu les joies de la ferme chez son grand-père, dans le Perche, lors de sa petite enfance, a retrouvé les émotions premières. « Je me suis vite rendu compte que cet endroit était génial, mais fragile. » Laurent Tillon a intégré l’ONF après ses études puis est devenu spécialiste de la biodiversité. Dans son ouvrage Les Fantômes de la nuit il raconte sa passion pour les chauves-souris, aujourd’hui gravement menacées. Marianne : D’où vous vient cette passion pour les chauves-souris ? [...]
- La réalité de la politique allemande en matière d'énergie
L'Allemagne vient de fermer ses dernières centrales nucléaires.
Climat : le faux-semblant du modèle énergétique allemand
Alors que l’Allemagne s’apprête à fermer ses derniers réacteurs nucléaires, la première économie européenne compte s’appuyer massivement sur le gaz dans le but de générer suffisamment d’électricité. Pour mieux faire passer la pilule, le gouvernement assure que les nouvelles centrales thermiques que le pays prévoit de construire carbureront dans un second temps à l’hydrogène renouvelable. Celui-ci devra d’ailleurs également permettre de générer des carburants de synthèse pour l’automobile, alors que l'Allemagne est parvenue à assouplir l’interdiction par l’UE de vente des véhicules thermiques neufs après 2035. Mais ces décisions interrogent, tant la promesse d'une bascule des combustibles fossiles à l’hydrogène décarboné repose sur des bases fragiles, et pourrait servir à justifier des investissements nocifs pour le climat. Décryptage.
Comment maintenir à flot une industrie extrêmement gourmande en énergie tout en diminuant le recours aux combustibles fossiles les plus polluants, et en se privant dans le même temps de l'électricité bas carbone issue des réacteurs nucléaires ? C'est une équation quasiment impossible à laquelle l'Allemagne doit faire face, prise en étau entre des injonctions contradictoires. Car pour satisfaire la demande intensive de ses consommateurs, la première économie européenne n'a d'autre choix que de s'appuyer sur un socle de moyens de production pilotable, sans variations imprévisibles de l'offre. Autrement dit, avec la sortie de l'atome civil, sur du charbon ou du gaz malgré l'urgence climatique.
C'était tout le sens du gazoduc Nord Stream 2 reliant la Russie à l'Europe, dont la construction a été interrompue par la guerre en Ukraine en février 2022. Depuis la coupure des livraisons par Gazprom, les centrales à charbon ont d'ailleurs été bien plus sollicitées que prévu outre-Rhin. Mais le gaz n'a pas dit son dernier mot, bien au contraire : en mars, le gouvernement a officialisé son souhait de presque doubler le nombre de centrales fonctionnant avec cette énergie fossile d'ici à 2030, en construisant 12 à 18 nouvelles grandes installations, pour sécuriser l'approvisionnement. Avant d'atteindre jusqu'à 150 gigawatts (GW) d'ici à 2045 (contre 27,5 GW aujourd'hui), soit plus de deux fois le parc nucléaire actuel de la France, selon le Fraunhofer Institute.
Pas d'inquiétude cependant, si l'on en croit la coalition au pouvoir : ces engins ne fonctionneront qu'au moment des pointes de demande, puisque d'ici à 2030, l'électricité devra être à 80% d'origine renouvelable. Surtout, et l'expression a fait couler beaucoup d'encre, les centrales en question devront être « hydrogen ready » (prêtes pour fonctionner avec de l'hydrogène), a assuré dans la foulée le chancelier Olaf Scholz. De quoi permettre de pallier l'intermittence des renouvelables, dont la production dépend largement des conditions météorologiques, sans pour autant s'appuyer sur les fossiles, a promis le chef du gouvernement.
70% de pertes lors du procédé
Seulement voilà : selon plusieurs experts, il s'agit là d'un pari extrêmement périlleux, sinon irréaliste. « Dire que ce sera compatible avec l'hydrogène, ce n'est que pure rhétorique destinée à masquer l'opposition frontale entre cette annonce et les objectifs climatiques de l'Allemagne », estime même Maxence Cordiez, ingénieur dans le secteur de l'énergie.
« L'arbre de l'hydrogène cherche à cacher la forêt gazière. Ce concept sert à faire avaler la pilule des investissements dans de nouvelles capacités fossiles. On le voit avec la construction des huit terminaux méthaniers pour réceptionner le gaz naturel liquéfié, et dans les efforts déployés par le gouvernement pour sécuriser sa stratégie d'approvisionnement en gaz sans la Russie », abonde un expert travaillant dans l'hydrogène et souhaitant garder l'anonymat.
Et pour cause, de nombreux obstacles risquent de barrer la route à cette stratégie de conversion à l'hydrogène. Premièrement, cette molécule est aujourd'hui « fabriquée » à partir de gaz fossile, par vaporeformage du méthane. Pour être décarbonée, celle-ci devrait être issue d'un procédé d'électrolyse consistant à décomposer l'eau grâce à un courant électrique. Mobiliser ensuite cet hydrogène dans une centrale à gaz consisterait donc à générer de l'électricité, afin de mettre au point du gaz... pour produire de l'électricité. Par conséquent, le rendement ne dépasserait pas 30%, dans le meilleur des cas.
« Depuis les premiers chocs pétroliers, on parle de l'hydrogène pour remplacer les fossiles. Aujourd'hui on en a absolument besoin pour les engrais ou la pétrochimie, mais si ça ne s'est pas développé au-delà, y compris pour produire de l'électricité, c'est parce que ça coûterait très cher. Et cette configuration économique découle tout simplement de la physique, et des pertes massives enregistrées lors du processus », souligne Maxence Cordiez.
A ces 70% de perte d'électricité s'ajouterait le coût élevé des infrastructures d'électrolyse et de stockage. « Et pour ces dernières, la démonstration de faisabilité à grande échelle est encore en attente », précise Maxence Cordiez. Le gestionnaire du réseau électrique français, RTE, a d'ailleurs étudié cette piste dans ses fameux scénarios de décarbonation du mix électrique de l'Hexagone, notamment dans la trajectoire 100% renouvelable. Résultat : celle-ci est « soumise à des incertitudes technologiques [...] et surtout industrielles », pointe l'organisme.
Partenariats avec les pays du Sud
Surtout, l'Allemagne ne disposera jamais de suffisamment d'électricité bas carbone pour produire l'hydrogène nécessaire - à moins, évidemment, de recourir au gaz fossile, ce qui n'aurait pas de sens d'un point de vue économique et climatique. Le gouvernement ne s'en cache d'ailleurs pas : l'objectif de production domestique d'hydrogène « renouvelable » s'élève pour l'heure à 14 térawattheure (TWh) seulement, pour une consommation estimée autour de 100 TWh en 2030 !
« A titre de comparaison, en France, on consomme actuellement 1 million de tonnes d'hydrogène : 600.000 tonnes sont coproduites par d'autres industries et 400.000 tonnes sont produites pour elles-mêmes par vaporeformage de méthane. Produire ces 400.000 tonnes de manière décarbonée, par électrolyse de l'eau, nécessiterait déjà l'équivalent de 3 réacteurs nucléaires dédiés », explique Maxence Cordiez.
Afin de recevoir en masse la précieuse molécule, Berlin tente ainsi de tisser une véritable diplomatie de l'hydrogène, notamment avec les pays du Sud. Et a déjà mis deux milliards d'euros de fonds publics sur la table pour nouer des partenariats avec le Maroc, la Namibie, la République démocratique du Congo ou encore l'Afrique du Sud. « L'idée, c'est qu'il faut exploiter tout le potentiel des régions très ensoleillées pour générer de l'électricité bas carbone, puis acheminer l'hydrogène qui en est issu en Allemagne, où il serait brûlé dans une centrale à gaz pour produire du courant », précise l'expert anonyme.
Captage et stockage du CO2
Reste que là aussi, le discours ne tient pas la route, selon Maxence Cordiez. « Ces pays font déjà face à des problèmes d'accès à l'eau et à l'électricité ! », relève-t-il. La Namibie, par exemple, souffre d'un stress hydrique chronique, qui ne devrait pas s'arranger avec le réchauffement climatique. Or, l'électrolyse nécessite de grandes quantités d'eau pure. Quant au Maroc et à l'Algérie, « leurs propres capacités proviennent aujourd'hui très majoritairement des fossiles, le charbon en tête », note l'ingénieur.
« Cela s'apparente au projet Desertec de 2009, d'initiative allemande, qui consistait à couvrir le Sahara de panneaux solaires pour approvisionner notamment l'Europe. Cela n'a jamais vu le jour car c'était farfelu, mais ça l'était moins que de le retenter en important de l'hydrogène ! », estime même Maxence Cordiez.
Dans ces conditions, Berlin explore aussi la production d'hydrogène « bleu », c'est-à-dire généré à partir d'énergies fossiles mais avec captation et stockage du CO2 à la sortie des usines. L'énergéticien allemand RWE a ainsi signé un contrat avec le Norvégien Equinor pour mettre au point, d'ici à 2030, 300.000 tonnes par an de la fameuse molécule produite par vaporeformage du méthane, en injectant le gaz carbonique qu'émet le procédé dans des réservoirs géologiques en mer du Nord.
De nombreux freins techniques
Il n'empêche qu'au-delà des incertitudes technologiques et économiques autour de la captation et le stockage du carbone, de nombreuses interrogations demeurent sur la faisabilité d'un acheminement de l'hydrogène par pipelines. Sur ce sujet, les positions françaises et allemandes divergent d'ailleurs fortement. En témoigne la saga autour du projet de gazoduc entre l'Espagne et l'Hexagone, BarMar. Longtemps refusé par Paris, ce vaste tuyau de transport d'hydrogène a finalement été accepté par Emmanuel Macron, sous la pression de Berlin et de Madrid, et renommé H2Med.
Et l'Allemagne ne compte pas s'arrêter là : de nombreux gazoducs existants devront être convertis pour recevoir de l'hydrogène, à l'instar des centrales thermiques. Cependant, là aussi, les ingénieurs se montrent perplexes. « Convertir le réseau est irréaliste. Il y aurait tout à changer niveau tuyauterie. A commencer par le revêtement, alors qu'on parle de milliers de kilomètres de conduits enterrés », affirme Ludovic Leroy, ingénieur dans l'énergie à IFP Training. A cela s'ajoute la question du changement des équipements, comme les valves, les robinets, les compteurs, mais aussi les compresseurs, « absolument pas compatibles avec le transport d'hydrogène », selon le formateur.
Par ailleurs, les huit terminaux méthaniers pour recevoir du gaz naturel liquéfié (GNL) que construit actuellement l'Allemagne ne pourront jamais recevoir la fameuse molécule, insiste l'ingénieur de l'Ifpen. « Le gaz se liquéfie à -163°C, et l'hydrogène à -253°C. Les métaux très riches en nickel qui tapissent les réservoirs dans les bateaux et les réservoirs à terre deviendraient cassants comme du verre si l'on remplaçait le GNL par de l'hydrogène », poursuit-il.
Rétropédalage dans l'automobile
Dans ces conditions, tous s'accordent à dire que cette denrée sera « largement limitée », et par là-même très probablement disputée. D'autant que l'industrie, l'agriculture, voire le transport aérien auront également besoin en grandes quantités de la précieuse molécule, sans quoi ces secteurs pourront difficilement se décarboner.
Or, Berlin entend également mobiliser cette ressource dans un autre domaine, qui devait pourtant jusqu'ici s'en passer largement grâce à l'électrification des procédés : l'automobile. En effet, pourtant très favorable à la loi sur la fin de la vente des voitures thermiques neuves après 2035, l'Allemagne a finalement retourné sa veste au dernier moment, lors du vote final des Etats membres de l'Union européenne début mars. Et a demandé l'autorisation exceptionnelle des carburants de synthèse s'ils sont issus d'une énergie décarbonée (principalement de l'hydrogène), afin de conserver les moteurs thermiques et toute l'industrie qui gravite autour. Une demande finalement acceptée par la Commission européenne fin mars.
Mais ce rétropédalage climatique interroge. Car les carburants de synthèse ne sont pas une solution plébiscitée par les constructeurs allemands, déjà très engagés dans l'électrification. Le seul à s'y être intéressé est Porsche, qui mène des expérimentations pour produire de l'hydrogène par électrolyse de l'eau au Chili. En cause : des difficultés à électrifier la Porsche 911, son modèle phare. Seul Ferrari s'est dit également convaincu par cette exception dans la loi. D'autant que ces e-fuels sont très coûteux à produire et nécessitent cinq fois plus d'énergie. Résultat : cette solution ne s'adressera en réalité qu'aux clients les plus fortunés et n'aidera pas à décarboner le parc automobile européen. Surtout, ces carburants de synthèse émettent toujours des particules comme les oxydes d'azote, très polluants et dangereux pour la santé.
En réalité, ce revirement permet surtout au ministre des Transports de monter en popularité dans son pays. En effet, dans un sondage récent, près de 65% des Allemands se montraient défavorables à l'interdiction de la vente des véhicules thermiques dès 2035. Et sans le vote de l'Allemagne sur ce texte, la loi n'aurait pas pu passer. Pour sûr, les choix de la première économie européenne engageront le continent tout entier.
______
RETROUVEZ NOTRE DOSSIER SPÉCIAL « LA REVANCHE DU NUCLÉAIRE »
- Parmi les stratégies de l'Allemagne: l'importation du charbon de Colombie.
Une mine à ciel ouvert assez catastrophique!
Colombie : le coût social et écologique du charbon que Berlin veut importer
France 24 le1/8/22
Alors que la guerre en Ukraine menace l'approvisionnement de l'Allemagne en gaz russe, Berlin cherche à diversifier ses sources de fourniture en énergie. Le pays pourrait notamment augmenter ses importations de charbon colombien. Mais ce choix divise la classe politique allemande car cette industrie a de lourdes conséquences sur l'environnement et les populations locales. Une députée écologiste s'est récemment rendue sur place. Reportage de Pascale Mariani, Laura Chará et Juan Orozco.
C'est la plus grande mine de charbon à ciel ouvert d'Amérique latine : El Cerrejón, dans le nord-est de la Colombie, est exploitée par la compagnie suisse Glencore. C'est ce site que Kathrin Henneberger, députée écologiste allemande, a choisi pour enquêter sur les conditions de la production colombienne de charbon.
L'élue entend dénoncer au Bundestag les conséquences socio-écologiques de cette industrie au moment où l'Allemagne pourrait augmenter ses importations depuis la Colombie, quatrième producteur mondial. Début avril, le chancelier Olaf Scholz en a fait la demande auprès du président Ivan Duque, actuellement en fin de mandat. Objectif : diversifier les sources d'approvisionnement en énergie alors que Moscou serre le robinet du gaz russe.
- Paris dénonce enfin la politique énergétique allemande.
Les émissions sulfurées ne s'arrêtent pas à la frontière allemande!
- Redécouvrir la géothermie
... qui ne détruit ni le paysage, ni la valeur des biens, ni la biodiversité, permet d'économiser l'électricité pour le chauffage et réduire le budget des collectivités et des particuliers
99 % de la masse de la Terre fait plus de 1000 °C. Pourquoi n'en profitons-nous pas?
Arrêtons de brûler des énergies fossiles et de dépenser des fortunes dans la fusion nucléaire. L’avenir pour produire de la chaleur est la géothermie.
Une carte blanche de Bertrand Piccard, psychiatre et explorateur
On a perdu assez de temps ! Alors que 99 % de la masse de la Terre fait plus que 1000 °C, l’humanité continue à brûler des énergies fossiles et à engloutir des fortunes dans la recherche sur la fusion nucléaire pour produire de la chaleur, au lieu d’utiliser celle qui se trouve sous nos pieds. Et l’on n’a nullement besoin d’être sur un terrain volcanique comme en Islande pour le faire. Géothermie profonde ou de surface ?
Il y a vingt ans, au forum de Davos, j’avais demandé au PDG d’une entreprise pétrolière pourquoi il ne forait pas pour extraire de la chaleur à la place du pétrole. La réponse avait été cinglante : “Parce que tout le monde sait que ça ne marche pas !” Il n’avait même pas daigné me faire préciser si je parlais de géothermie profonde destinée à extraire directement de la chaleur, ou de surface fonctionnant avec une pompe à chaleur qui amplifie les différences de température pour chauffer les maisons.
Il est vrai que des tentatives de forages profonds s’étaient soldées par de petites secousses sismiques mais seulement parce qu’elles s’étaient faites par fracking comme pour l’extraction du gaz de schiste aux USA. Il y a d’autres façons de procéder comme celle du Français Accenta qui fait passer des tuyaux d’eau glycolée se réchauffant en faible profondeur.
La géothermie en milieu urbain
On se retrouve souvent devant ce frein au changement : les start-ups innovantes ne sont pas considérées comme crédibles et, seules, les grandes entreprises promouvant le statu quo sont écoutées. Pourtant, aujourd’hui, si l’on reparle de géothermie, c’est grâce à un géant industriel, de surcroît spécialiste de l’exploration pétrolière, SLB, (NdlR anciennement Schlumberger) qui a lancé une spin-off, Celsius, dans ce nouveau business. Son offre est attrayante : utiliser la géothermie en milieu urbain en forant sur un espace aussi réduit que deux places de parking pour chauffer de grands édifices et non plus seulement de petites maisons individuelles.
80 % d’économie
En outre, cette technologie répond à la demande accrue de climatisation, ne se limitant pas à produire de la chaleur en hiver mais aussi de la fraîcheur pendant l’été, en remettant de la chaleur dans le sol. Comparée à une installation au gaz, la géothermie peut réduire de 60 % la consommation d’énergie d’un bâtiment et de 40 % ses coûts d’exploitation, tout en éliminant jusqu’à 90 % des émissions de CO2. Et comparée à un radiateur électrique, c’est 80 % d’économie. De nouveaux systèmes de financements sont aussi en train de se mettre en place pour louer l’usage de la machine au lieu de vendre toute l’installation. On ne peut donc plus dire “trop coûteux, trop risqué !”
Un changement de paradigme
La reconnaissance de ce potentiel représente un changement de paradigme prometteur dans la manière d’envisager la production de chaleur de nos bâtiments. J’en veux pour preuve la constitution toute récente de l’association France Geoenergie pour faire connaître aux citoyens, entreprises et gouvernements, cette solution plus que rentable qui protège l’environnement. On dirait qu’il a fallu la tragédie ukrainienne pour abattre nos idées reçues et réaliser qu’on pouvait faire mieux que de subir une dépendance aux sources fossiles.
Mais il y a encore mieux. En France, la loi sur les énergies renouvelables du gouvernement Borne qui vient de paraître au Journal officiel, a repris telle quelle la première des 50 recommandations législatives de l’initiative privée “Prêt à Voter” de la Fondation Solar Impulse, qui demandait l’obligation d’effectuer des études de faisabilité géothermique lors de nouveaux chantiers. Désormais, on ne pourra plus dire qu’on ne savait pas. C’est de la démocratie participative, au-delà des clivages partisans, qui n’a rien à voir avec du lobbying.
La voix des innovateurs
Il ne s’agit pas de défendre des intérêts particuliers contre l’intérêt général mais, à l’exact opposé, de se battre contre les vieux dinosaures pour faire évoluer un statu quo au profit de la collectivité. Un élu ne peut prétendre avoir la science infuse mais les citoyens peuvent lutter contre la peur du changement et promouvoir une cause commune pour le bien commun.
Quand le climat change, la loi doit changer. C’est chose faite en France avec la géothermie. Mais il faut continuer à porter la voix des innovateurs qui, sans une mobilisation importante, auront du mal à se faire entendre. Au-delà du “simple” sujet des énergies renouvelables, nos pays sont des terres d’innovation où poussent des centaines de technologies et concepts novateurs. Comme toute culture, il faut en ramasser les fruits avant qu’il ne soit trop tard.
- Le Figaro revient sur l'enquête parlementaire conduite par le député Schellenberger
et les dégâts de plusieurs décennies d'errance. La pente sera dure à remonter
Nucléaire
Les clés pour comprendre pourquoi le nucléaire est en ballotage, Le Figaro, le 14/04/2023
DÉCRYPTAGE - Malgré le changement tardif de doctrine sur le nucléaire, Emmanuel Macron va avoir du mal à rattraper le temps perdu par lui-même et ses prédécesseurs.
1. Le rapport qui étrille
«Cette histoire est celle de l’endormissement d’une nation qui a oublié de penser sa puissance et son rôle mondial, se recroquevillant sur son marché intérieur et des stratégies électorales», écrit le député LR Raphaël Schellenberger, président de la commission d’enquête sur la souveraineté énergétique. Le Parlement a donc joué son rôle, mais un peu tard. Les quinquennats de Lionel Jospin et François Hollande en ressortent en lambeaux, à chaque fois à cause d’alliances conclues avec les Verts.
Leurs ultimatums antinucléaires ont eu raison du bon sens écologique du Parti socialiste qui avait su servir l’intérêt industriel et énergétique du pays dans les années Mitterrand. Mais, au-delà, il faut souligner l’efficacité des antinucléaires pour noyauter les commissions d’experts. La Commission nationale du débat public (CNDP) est connue pour ses positions antinucléaires. Les scénarios énergétiques de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) misent sur le renouvelable. Il en va de même pour le Réseau de transport d’électricité (RTE), qui parie sur les comportements vertueux des consommateurs pour écarter l’hypothèse nucléaire.
2. Le gouvernement à la peine
Une première loi a été promulguée en mars pour accélérer les procédures de production d’énergies renouvelables. Mais c’est seulement grâce à un amendement de la droite sénatoriale que le plafond de 50 % du mix énergétique pour le nucléaire, imposé pendant le quinquennat de François Hollande, a été supprimé. Cette loi autorise également EDF à commencer des travaux de terrassement en anticipation de la prochaine loi de programmation des EPR en 2024. C’est bien, mais le gouvernement n’a pas réussi à faire voter la fusion de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) et de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN).
Les comités d’experts du premier sont hostiles au nucléaire, et leur absorption légitime par l’ASN (comme en Grande-Bretagne et aux États-Unis) est renvoyée à une nouvelle proposition de loi. Enfin, le lancement des 12 EPR promis par Emmanuel Macron reste incertain. Il dépend du vote difficile de la loi énergie climat de 2024. Car elle sera en même temps pronucléaire (et donc combattue par LFI et EELV) et propre nouvelable (détesté par RN et une partie de LR). Une adoption sans recours au 49-3 n’est pas gagnée. Or, Élisabeth Borne exclut désormais le recours au 49.3…
3. L’Europe en embuscade
Acte 1: en décembre 2021, la directive sur la taxonomie des énergies propres a accordé du bout des lèvres au nucléaire un statut d’énergie «de transition». Autrement dit, il devra disparaître, à terme, au profit d’un monde idéal fait d’énergies renouvelables. Par ailleurs, les critères sont difficiles à remplir pour les entrants européens qui veulent développer le nucléaire civil à partir de zéro. Il faudra également attendre des autorisations techniques de la part de la Commission, sans que celle-ci soit tenue de les rendre dans un délai connu à l’avance.
Les levées de fonds privés seront à la merci de ces aléas bureaucratiques.
Acte 2: en mars dernier, le «Net Zero Industry Act», annoncé par la Commission européenne pour stimuler la transition énergétique, a confirmé le rôle très secondaire que joue l’atome dans l’agenda européen. Il n’est mentionné que pour la production d’hydrogène, mais avec des réacteurs de quatrième génération (zéro déchet) qui n’existent pas encore, et les petits réacteurs modulaires sont en cours de développement. Enfin, la France n’est pas en position favorable pour renégocier le mécanisme de tarification de l’énergie qui pénalise son industrie nucléaire. L’Europe de l’atome reste un rêve du passé.
- Brèves du 16/04/2023
BREVES 15-4-23
Plus de 150.000 emplois industriels menacés en France LES ECHOS le 12-4-23 Le maintien à des niveaux élevés des prix de l'énergie compromet à lui seul 117.000 emplois dans l'Hexagone, selon une étude de la Fabrique de l'industrie. Quatre secteurs énergo-intensifs concentrent les risques.
La réindustrialisation du pays est devenue une préoccupation politique majeure pour l'exécutif. « Pour la première fois, nous avons une politique industrielle à l'initiative de la France et de l'Allemagne », s'est félicité mardi sur Europe 1 le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, qui prépare un projet de loi pour développer l'industrie verte . La partie est pourtant loin d'être gagnée. Selon une étude de la Fabrique de l'industrie, une nouvelle vague de désindustrialisation menace la France. Entre le renchérissement des prix de l'énergie qui frappe l'Europe, l'instauration d'une taxe carbone aux frontières et la concurrence des subventions massives aux industries vertes prévues par l'Inflation Reduction Act (IRA) américain , près de 155.000 emplois industriels - soit 6 % environ de l'effectif - seraient en danger dans l'Hexagone, qu'ils soient supprimés ou fragilisés. Ce chiffrage intègre aussi des créations d'emplois qui n'auront pas lieu dans le contexte actuel.
Allemagne : la sécurité énergétique «assurée» malgré la sortie du nucléaire, dit Berlin, Le Figaro, 13/04/2023 _ EXTRAIT
Avant l'échéance de samedi, plusieurs figures politiques ont dit craindre pour les objectifs climatiques de l'Allemagne et l'indépendance énergétique du pays privé de l'énergie atomique. « C’est un jour noir pour la protection du climat », a déclaré mardi Jens Spahn, chef de file des conservateurs de la CDU au Parlement.
Les trois derniers réacteurs fournissaient 6% de l'énergie produite dans le pays l'an dernier, contre 33% pour le charbon, qui a lui-même connu une hausse de 8% en 2022 en raison de la crise gazière. Au sein même de la coalition, des membres du parti libéral FDP, dont le président Christian Lindner occupe le ministère des Finances, ont demandé une nouvelle prolongation des centrales.
Extrait Capitol Energie le 3/4/23
Quel prix pour l’Arenh en 2023 ?
En juillet 2022, l’Assemblée nationale a adopté en première lecture l’augmentation du prix de vente de l’Arenh. Dans le cadre d’une loi d’urgence pour le pouvoir d’achat, le prix de l’Arenh devait être porté à « au moins 49,5 €/MWh » à partir du 1er janvier 2023. Cependant, le Sénat n’a pas approuvé cette demande. La CRE annonce donc en décembre 2022, que le prix de l’Arenh en 2023 restera de 42 €/MWh.
CEREME
EDF /Nucléaire :
L’IEA invite les États membres opposés au nucléaire à « faire une autocritique sérieuse » - 11.04.23
Le directeur de l'Agence internationale de l'énergie (IEA), Fatih Birol, a déclaré lors d'une conférence à Paris que les États membres de l'UE opposés au nucléaire devront faire une autocritique sérieuse après la fin de la guerre en Ukraine. La guerre a provoqué une réduction drastique des exportations de gaz russe vers l'UE. Birol a déclaré que la décision de certains États membres de l'UE de mettre tous leurs oeufs dans le même panier, à savoir la Russie, était une erreur stratégique majeure. Il a également critiqué l'UE pour avoir été froide à l'égard du nucléaire. Selon Birol, le nucléaire jouera un rôle important dans la décarbonisation de l'énergie et la puissance nucléaire aura doublé d'ici à 2050 dans le monde. (Euractiv)
L'Etat a demandé à EDF d'étudier le scénario d'une augmentation de la puissance de ses réacteurs existants pour redresser sa production électrique, indique le média La Tribune.
EnR
Directive RED : la rédaction du compromis trouvé en trilogue ne fait que commencer
Une première réunion technique s’est tenue le 13 avril pour mettre au propre le contenu de l’accord scellé le 30 mars à l’aube entre Conseil, Parlement et Commission. Au menu : la rédaction de l’article 3, fixant une cible de 42,5 % d’ENR dans la consommation européenne d’énergie en 2030 et un effort supplémentaire facultatif de 2,5 %. L’objectif indicatif d’atteindre 5 % de renouvelables issues « de technologies innovantes » a également été formalisé par écrit. Autres articles au programme : le sort des biocarburants comportant des risques de modifications de l’affectation des sols (ILUC, en anglais) – dont la consommation devra diminuer selon un rythme à définir par la Commission, ou encore, les objectifs pour les transports. Le secteur devra réduire de 14,5 % son intensité carbone en 2030 ou consommer 29 % d’ENR. L’obligation pour les États de lancer des projets communs de renouvelables avec leurs voisins européens (article 9) a aussi été discutée en vue de sa rédaction définitive. Mais le très polémique article 22b, prenant en compte l’hydrogène bas carbone dans le calcul de la cible d’hydrogène vert fixée à l’industrie, n’était pas à l’agenda de cette première réunion de formalisation du compromis (voir l’accord trouvé). D’autres rendez-vous suivront pour finaliser la version révisée de la directive RED, mais aucun calendrier n’est encore sur la table.
« Si l’Union européenne s’inquiète aujourd’hui de sa dépendance en matières premières, c’est assurément à raison » - 10.04.23
La Commission européenne a récemment publié une stratégie pour les matières premières critiques, qui inclut une liste de 51 minerais considérés comme bientôt plus importants que le charbon et le pétrole. Ces ressources sont nécessaires à la production de technologies-clés pour la transition énergétique, telles que les éoliennes, les panneaux solaires et les batteries électriques. L'Union européenne dépend fortement de pays tiers pour s'approvisionner en ces matières premières. Afin de garantir l'approvisionnement européen à long terme, la stratégie repose sur deux piliers : européaniser les chaînes de valeurs et diversifier la provenance des importations. Pour atteindre ces objectifs, des accords de libre-échange ont été conclus avec plusieurs pays et d'autres sont en cours de négociation. (Le Monde)
Solaire photovoltaïque : l'Académie des technologies appelle à agir face à la « domination chinoise » - 11.04.23
L'Académie des technologies a publié une note mettant en garde contre la domination de l'industrie chinoise dans la filière solaire photovoltaïque. Alors que cette filière est en pleine croissance et pourrait représenter jusqu'à 37% de l'électricité mondiale d'ici 2050, l'Europe a vu sa production diminuer de manière significative ces dernières années. L'Académie des technologies appelle l'Europe à prendre des mesures pour se doter de moyens de production significatifs pour l'amont de la chaîne de production des cellules silicium afin de rester compétitive et éviter que la Chine ne profite de la croissance de cette filière. Elle recommande notamment de développer les technologies de pointe et les politiques interventionnistes pour permettre un redémarrage de l'industrie. (Connaissance des Energies)
تعليقات