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20/03/24 Allemagne-Europe-EnRI-Nucléaire-etc...

Dernière mise à jour : 21 mars




La politique énergétique conditionne la santé économique des pays et tout ce qui va avec pour la population.

L'Allemagne avec son Energiewende est dans la tourmente, depuis qu'elle ne peut plus compter sur le gaz russe  bon marché pour pallier l'intermittence de l'éolien et du solaire. La Cour des comptes allemande dénonce avec force les conséquences désastreuses, le DG de BASF parle de délocalisation..

La part de l’industrie va diminuer dans l’économie de l’UE, selon le PDG de BASF

Thomas Moller-Nielsen

Journaliste Économie

La part de la production industrielle dans le PIB total de l’UE va diminuer en conséquence de la persistance de la hausse des prix de l’énergie, selon le directeur de la plus grande entreprise chimique au mond.

S’adressant à des journalistes à Bruxelles lundi (18 mars), Martin Brudermüller, PDG du géant allemand BASF, a signalé que les industries européennes à forte intensité énergétique étaient « particulièrement » susceptibles d’être impactées par le maintien de prix de l’énergie élevés, en soulignant cependant que la désindustrialisation était un mot trop « dur » pour décrire la situation économique actuelle de l’Europe.

Le PDG a en effet ajouté que cette situation était un « développement structurel » et n’était pas nécessairement négatif.

Selon lui, cela pourrait même être « sain » pour l’économie européenne. « Je dirais que le mot “désindustrialisation” est très dur parce qu’il donne l’impression que tout disparaît », a expliqué M. Brudermüller en réponse à une question d’Euractiv. « Je pense que ce n’est pas le cas. Mais ce que nous constaterons assurément, c’est que la part de l’industrie contribuant au PIB va très probablement diminuer. »

Bien que les prix du gaz et de l’électricité soient retombés en dessous du pic de 2022, ils ne devraient pas revenir aux niveaux d’avant la pandémie dans un futur proche, a déclaré la Commission européenne, mettant en garde contre les conséquences économiques à long terme des prix élevés de l’énergie sur l’économie.

« C’est particulièrement vrai pour les industries à forte intensité énergétique, et l’industrie chimique en fait partie, tout comme le ciment, l’acier et bien d’autres encore. »

Répondant à la suggestion émise le mois dernier par Christine Lagarde, la présidente de la Banque centrale européenne, concernant la nécessité de « réorganiser » le modèle économique allemand axé sur l’industrie manufacturière, M. Brudermüller a reconnu que ce pays en particulier « sera moins attractif pour les industries à forte intensité énergétique »..« C’est pour cette raison que la part de l’énergie diminuera. Cela ne veut pas dire que tout va disparaître. Mais oui, il est très probable que cette industrie choisisse de ne plus s’implanter en Allemagne. Nous devons faire face à cette situation. »

De manière générale, de tels commentaires ont tendance à alimenter les craintes que le déclin industriel actuel de l’UE, exacerbé par l’invasion de l’Ukraine par Russie, ne finisse par devenir irréversible.

Eurostat, l’Office statistique officiel de l’Union européenne, a indiqué la semaine dernière que la production industrielle de l’UE avait chuté de 5,7 % en janvier, d’une année à l’autre. L’Allemagne, la plus grande économie de l’Union et une puissance industrielle qui dépendait fortement de l’énergie russe bon marché avant la guerre en Ukraine, a enregistré une baisse de 5,4 %.

Toutefois, dans ce contexte, M. Brudermüller a défendu l’importance de la concurrence sur le marché libre, en expliquant qu’un « développement structurel est sain parce que si une entreprise n’est pas bonne, elle quitte le marché. »

M. Brudermüller s’est exprimé après un événement organisé par la Table ronde européenne de l’industrie, dans le cadre duquel il a exhorté les décideurs politiques de l’UE à simplifier la réglementation de l’Union et dans lequel il a également suggéré que la compétitivité industrielle de l’Europe puisse être rétablie en laissant la main invisible du marché « faire sa magie ».

« Je suis très préoccupé par le fait que l’instinct politique à Bruxelles et dans la plupart des capitales soit toujours de parvenir au changement par le biais de réglementations prescriptives », a-t-il déclaré. « La magie bien réelle de la main invisible est plus que suffisante. »



Allemagne et EnRI vs France et nucléaire

Exemple : 20 mars à 19h , peu de vent, pas de soleil

L'Allemagne affiche un production d'électricité avec 780 g/KWh de CO2

L'éolien ne représente que 6,36% de la production d'électricité (avec près  de 30 000 éoliennes !!)

La production bas carbone ne représente que 33% (biomasse + hydro)

La France affiche une production d'électricité avec 44 g/KWh de CO2

L'éolien représente 3,3% de la production d'électricité

La production bas carbone représente 94% (nucléaire majoritairement)


La Cour des comptes allemande dresse un tableau apocalyptique de la transition énergétique

La Cour des comptes allemande dresse un tableau apocalyptique de la transition énergétique déployée par Berlin dans un rapport.

Avec Samuel Furfari

La Cour des comptes allemande dresse un tableau apocalyptique de la

transition énergétique déployée par Berlin dans un rapport. Quels sont les principaux

enseignements des conclusions de la Cour des comptes fédérale allemande concernant la

transition énergétique ?

Samuel Furfari : Elle a estimé que malgré les coûts astronomiques pour faire la

promotion des énergies renouvelables, les résultats escomptés n’ont pas eu lieu. Il y a

beaucoup de retard par rapport aux objectifs qui avaient été fixés. Il y a également un manque

flagrant d’investissements dans les infrastructures.

Le développement des éoliennes ou de certaines centrales a notamment été freiné par

manque d’infrastructures et d’investissements, notamment pour les lignes aériennes pour

transporter l’électricité. La Cour des comptes souligne ces retards dans les objectifs et les

infrastructures.

Selon les chiffres de la Cour des comptes allemande, le retard par rapport à la

planification pour l’extension du réseau serait en mauvaise voie. Il y aurait un retard de

sept ans et de 6 000 kilomètres apparemment. Il serait nécessaire d’investir plus

de 460 milliards d’euros pour l’expansion du réseau électrique. Sachant que les tarifs de

l’électricité ont déjà augmenté de 43 % pour les clients résidentiels et de plus de 32 % pour

les clients commerciaux et 80 % pour les clients industriels, ne va-t-il pas y avoir un rejet

massif de la politique de l’EnergieWende ?

Cette question est fondamentale. En aval des centrales électriques, il y a tout un réseau

électrique entre la production et votre interrupteur à la maison. Ce réseau électrique est

gigantesque parce qu’il faut transporter en haut voltage beaucoup d’électricité sur des longues

distances notamment en Allemagne puisque les éoliennes se trouvent essentiellement dans le

nord et la consommation essentiellement dans le sud du pays. Ensuite, elle est transformée à

plus bas voltage pour ensuite être distribuée dans les rues jusque dans votre logement. Tout

cela coûte extrêmement cher.

En France, une usine qui produit de l’électricité, s’appelle une centrale électrique. C’est la

même chose en espagnol et en italien. Pourquoi ? Parce qu’à l’origine de la production

d’électricité, il y avait une dispersion des usines d’électricité. Chacun développait sa petite

usine, notamment en fonction des chutes d’eau disponibles. Il fallait donc construire un réseau

aux alentours de cette usine. Progressivement, on s’est aperçu que le bon sens exigeait de ne

pas avoir des petites unités, mais d’en avoir une grande centrale. Il fallait centraliser la

production d’électricité. Depuis le début XX siècle, l’objectif a été de construire de

grandes centrales.

Or, pour les énergies renouvelables, il ne peut être question de grandes centrales et on nous

a inculqué que l’avenir est à la décentralisation, bafouant ainsi les générations d’ingénieur qui

se sont évertuées à centraliser la production. Mais à partir du moment où vous considérez que

les petites centrales représentent l’avenir, vous devez multiplier le nombre de kilomètres de

câbles. La Cour des comptes allemande évoque 6000 kilomètres de retard. La situation est

catastrophique et témoigne de l’erreur commise dans la transition énergétique allemande.

Afin de justifier tout cela, on a même inventé le concept de « smart grids »,

réseau intelligent. Pourtant, les réseaux n’étaient pas « stupides » avant. Les

réseaux électriques étaient bien gérés par le passé. Dans les écoles polytechniques, dans les

sections d’électricité, on a toujours formé des ingénieurs spécialisés en réseaux électriques.

Cet aspect fondamental a été écarté, car il fallait justifier la multiplication d’éoliennes et de

panneaux solaires. Et donc c’est pour cela qu’il y a 6000 kilomètres de retard. Or, tous ces

réseaux utilisent du cuivre, un matériau qui coûte cher. C’est ce qui explique que les

investissements sont très onéreux et peut-être que l’Allemagne n’avait pas mesuré l’ampleur

de l’investissement à consentir pour multiplier les éoliennes dans le pays.

Lorsque l’on pense que le vent est gratuit et que donc tout va être gratuit, cela aboutit à une

erreur énorme de politique énergétique.

Exprimant de gros doutes quant à la possibilité d’une élimination rapide du charbon

en 2030, la Cour fédérale des comptes Allemande alerte sur le fait que les dix centrales

électriques au gaz prévues ne suffiront pas à garantir la sécurité d’approvisionnement.

L’objectif d’un approvisionnement sûr en électricité ne peut donc être garanti. Est-ce que

là aussi, il n’y a pas une crainte face à cette transition au charbon de voir des risques liés

à l’énergie ressurgir en Allemagne ?

La Cour des comptes a souligné quelque chose de très grave. Plus vous développez des

énergies alternatives, variables et intermittentes, plus vous devez préparer une solution de

secours et pérenne.

Il n’est pas possible d’installer une éolienne et à côté ne pas avoir une autre centrale qui va

prendre le relais lorsqu’il n’y aura pas de vent. Dans l’UE, il y avait assez de centrales existantes.

De sorte que lorsque l’on ajoutait une éolienne, après tout, il y avait bien des centrales au

charbon ou nucléaires ou au gaz qui fonctionnaient pour pallier l’intermittence. Mais à partir

du moment où en Allemagne on arrête les centrales nucléaires et au charbon et qu’on ne veut

que de l’éolien et du solaire, vous êtes obligés de construire une. garde naturel.

Or, vous ne pouvez pas baser un réseau électrique uniquement sur des éoliennes et du

solaire, car l’éolien ne produit que 23 % du temps et le solaire 1 1 % du temps. Donc quand

vous installez une éolienne, il vous faut un remplacement qui va fonctionner 75 % du temps.

Les Allemands l’ont compris et suite à leur décision d’arrêter le charbon à cause des émissions

de CO et le nucléaire, il va falloir construire des centrales au gaz.

Mais avec la difficulté qu’il y a eu avec la Russie, l’Allemagne est vraiment fragilisée, car il n’y a

plus assez de gaz pour l’industrie chimique et pour le secteur domestique. En plus, le gaz est

devenu cher, car ils ne bénéficient plus du gaz russe bon marché.

En Allemagne, les difficultés sont réelles, car ils ne peuvent pas développer l’éolien et il n’y a

pas assez de centrales au gaz pour pallier l’intermittence.

La Cour fédérale des comptes a également critiqué le fait que le ministère de

l’Economie ait présenté de manière trop positive l’évolution des prix de l’électricité. La

Cour constate que les coûts supplémentaires de la transition énergétique ne sont pas pris

en compte, notamment les coûts intégrant l’expansion du réseau ou les capacités de

secours. Est-ce que cela ne crée pas une fausse image des coûts réels de la transition

énergétique ? Est-ce que cela ne va pas rendre plus difficile l’acceptation de la

transition énergétique au sein de la population allemande ?

Cette vérité est en train de devenir patente. Les énergies renouvelables ont toujours été

présentées comme peu chères, efficaces et permettant d’inonder le monde avec cette

technologie. La situation allemande démontre maintenant que tout cela est complètement

biaisé et faux.

La Cour des comptes allemande confirme que cette transition énergétique va coûter

beaucoup plus cher que ce qui était prévu et anticipé.

En France aussi, la Cour des comptes a aussi fait le même constat l’an dernier. Mais cela n’a

rien changé. Personne ne met en pratique les conclusions du rapport.

Le président de la Cour aurait déclaré que la sécurité d’approvisionnement était

menacée, que l’électricité est coûteuse et le gouvernement fédéral n’est pas en mesure

d’évaluer de manière exhaustive l’impact de la transition énergétique sur le paysage, la

nature et l’environnement. Est-ce que nous assistons à un grand gâchis

allemand ? N’est-ce pas inquiétant pour l’avenir de l’Allemagne et même pour

l’Europe sur le plan de l’énergie ?

La Cour des comptes allemande a aussi mentionné le gâchis environnemental, car il est

vraiment insupportable de voir des éoliennes partout en Allemagne. Il y a un immense

gaspillage d’argent public pour quelque chose qui n’apporte pas grand-chose et surtout, qu’au

niveau mondial, les autres pays ne cessent pas d’émettre du CO. Ce que fait l’Allemagne est

vraiment totalement insignifiant dans le cadre de la lutte pour le changement climatique et

cela leur coûte horriblement cher, tout le en détruisant le paysage. Les conclusions sont donc

un zéro pointé pour l’EnergieWende Allemande.

Il est urgent maintenant de changer la mentalité des députés européens. Il y a encore une

trop grande majorité de politiciens à Strasbourg qui sont encore dans ce paradigme utopique

de l’EnergieWende. Beaucoup de députés européens ne sont pas informés et ne veulent pas

s’informer parce que pour eux la transition énergétique est un dogme.

La Cour des comptes allemande vient de donner un énorme coup dans la fourmilière.

J’espère qu’à Strasbourg, il y aura tout de même une prise de conscience du prochain

Parlement. Nous sommes en train de commettre des erreurs. Il faudrait aussi que l’UE cesse

de courir derrière les en fixant de nouveaux objectifs toujours plus contraignants. Même en

pleine crise des agriculteurs, la Commission européenne vient de publier un rapport de

605 pages avec de nouvelles normes et de nouveaux objectifs à atteindre. Ils sont dans un

monde parallèle.

Alors que le modèle allemand avait été plébiscité en Europe et que certains étaient

tentés de le suivre, avec cette déclaration de la Cour fédérale allemande, est-ce qu’il ne

pourrait pas y avoir une inflexion en Europe pour obtenir une transition moins

coûteuse ?

J’attendais ce moment depuis longtemps. Je travaille depuis des décennies sur tout cela. J’ai

été responsable des énergies renouvelables. Il fallait essayer ces modèles de transition, mais

que maintenant que les chèques évident il faut arrêter dilapider l’argent public pour produire

des énergies renouvelables. Cela coûte horriblement cher et cela ne sert à rien pour le CO2 mondial donc il faut arrêter. Les seuls bénéficiaires sont les investisseurs dans ces centrales,

car, à cause de la courbe de mérite, ils embauchent la différence entre le coût marginal

pratiquement nul du vent et le coût marginal de la dernière centrale au gaz mise en service

pour satisfaire la demande. Il y a en fait une véritable escroquerie payée par toute la

communauté des consommateurs.

La nouvelle Commission et le nouveau Parlement européen doivent avoir le courage de

mettre fin à ce système unique qui consiste à transférer l’argent des consommateurs vers les

comptes en banque des investisseurs en énergie renouvelable. Est-ce que le gouvernement

allemand va oser prendre les mesures qui s’imposent ? Est-ce que les autres

gouvernements vont-ils le faire aussi ? Est-ce que l’Union européenne va-t-elle mettre

fin à ce mécanisme pernicieux ?

Dans mon livre publié la semaine dernière « Énergie, mensonges d’État. La

destruction organisée de la compétitivité de l’UE » (édition L’Artilleur), je démontre

que pendant 66 ans l’Union européenne a tout fait pour que les citoyens et l’industrie

disposent d’une énergie abondante et bon marché. Ce n’est que depuis l’accord de Paris que

tout a périclité. Nous avons un manque d’énergie et elle est chère. Pendant ce temps-là, nos

concurrents dans le reste du monde profitent de l’énergie abondante et bon marché, ils le

feront de plus en plus en nous laissant avec notre illusion de la décarbonation. Nous devons

être reconnaissant envers la cour allemande qui a eu le courage de dire que l’EnergieWende

est un échec Plus vite on revient à la politique qui avait été suivie avant l’accord de Paris mieux

on se portera.

Samuel Furfari vient de publier "Energie, mensonges d'état La destruction organisée

de la compétititivité de l'UE" aux éditions L'Artilleur

 

L'Europe influencée par l'Allemagne persévère dans des objectifs de moyens pour la décarbonation ( ex objectif de 40% d'ENR dans la production d'électricité ) au lieu d'objectifs de résultats  (X gr de CO2 par KWh)

Entêtement coupable

Énergies renouvelables : qui dira stop à l’absurde entêtement de la Commission européenne ?

Devant le Parlement européen, Kadri Simson, la commissaire européenne à l’énergie, a évoqué l’échec de la France sur ses objectifs liés aux énergies renouvelables et a incité l’Hexagone à déployer de nouvelles mesures.

Atlantico : Devant le Parlement européen, Kadri Simson , la commissaire

européenne à l’énergie, a évoqué l’échec de la France sur ses objectifs liés aux énergies

renouvelables et a incité l’Hexagone à déployer de nouvelles mesures. La France n’a-t-elle

pas l’une des énergies les plus décarbonées d’Europe ?

Samuel Furfari : Pour la Commission européenne, ce qui compte n’est pas l’objectif

vis-à-vis du nucléaire, mais l’objectif des énergies renouvelables. Et la France n’a pas atteint

l’objectif concernant ce domaine. Il est possible de se retrancher derrière le fait que la France a

une économie décarbonée grâce au nucléaire. Mais cet objectif des énergies renouvelables n’a

pas été atteint par la France. Reste à savoir s’il s’agissait d’un objectif pertinent. Mais la France

n’est pas le seul pays à ne pas avoir atteint ses objectifs dans ce domaine. Beaucoup d’autres

États membres n’ont pas atteint leurs objectifs et ils ne dépendent pas, comme la France, du

nucléaire. L’Allemagne est notamment concernée aussi et a eu des difficultés à répondre aux

critères exigés.

Est-ce que cela ne témoigne pas de l’entêtement de la Commission européenne qui

confond la fin (la réduction des émissions) et les moyens ?

En 2001 , l’objectif était surtout un objectif pour les énergies renouvelables. Progressivement

à partir de 2009, un objectif de décarbonation a été intégré et depuis l’accord de Paris des

objectifs extrêmement ambitieux de réduction des émissions de CO. Il faudrait donc atteindre

ces deux critères. Mais la France a tenu à défendre sa stratégie, et elle a raison, en expliquant

qu’elle était sur la voie de la décarbonation grâce à l’énergie nucléaire. Pourquoi voudriez-vous

que je fasse plus d’efforts en matière d’énergies renouvelables alors que je suis le champion de

la décarbonation grâce au nucléaire ? Mais la France est responsable puisqu’elle a accepté cet

objectif contraignant d’énergie renouvelable. Je suis très critique sur la Commission

européenne, mais aussi sur les États membres parce que la Commission européenne ne peut

faire que ce que les États membres décident. La France est coupable justement par rapport

aux objectifs tout autant que les autres états membres. C’est trop facile d’accuser Bruxelles

quand les décisions sont prises par les chefs d’État et de gouvernement, sans oublier le

Parlement européen ! En Allemagne, il y a aussi des retards et des difficultés avec la transition

énergétique allemande qui est en difficulté. La plupart des pays européens en réalité sont en

retard sur la transition énergétique, mais ce sont eux qui se sont mis la corde au cou.

La Commission européenne a fixé des objectifs irréalistes et qui ont un coût extrêmement

important. La plupart des pays n’ont donc pas été en mesure de remplir ces objectifs de la

Commission. Cela va aller de mal en pis, car jusqu’à présent, les objectifs remplis étaient

relativement bon marché. Les objectifs les plus ambitieux risquent de ne pas être atteints et de

coûter très cher.

Certains objectifs fixés par la Commission sont beaucoup trop ambitieux et irréalistes.

Il y a quelques exceptions comme la Suède qui bénéficie de l’hydroélectricité, du bois des

forêts et de la biomasse, utilisés de manière intensive, surtout pour le chauffage urbain, sans

oublier le nucléaire.. La même stratégie est à l’œuvre dans certains pays baltes, en Finlande.

Les autres pays sont réellement en difficulté vis-à-vis des objectifs fixés.

Est-ce qu’il n’y a pas un entêtement de la Commission européenne dans le projet des

énergies renouvelables ? Comment faire un système plus vertueux ?

Il y a effectivement un entêtement de la Commission européenne, mais il y a un entêtement

du Conseil européen et du Parlement européen, qui ensemble sont le véritable législateur.

Tout ce qui est décidé par le Parlement européen est lié à l’action et aux engagements des

États membres, la France en tête. La France est un grand pays au niveau de Strasbourg et de

Bruxelles et elle a accepté ces objectifs excessifs. Emmanuel Macron a accepté tous les

objectifs de la Commission européenne, il a même imposé Ursula von der Leyen comme

présidente de la Commission en sachant tout cela. On verra s’il la soutiendra encore ce qui

démontrera son hypocrisie envers les agriculteurs.

Y a-t-il des solutions alternatives face à ces objectifs inatteignables ? Peut-il y avoir

des coopérations entre États ou des outils technologiques qui permettraient de remplir

ces objectifs ?

La coopération entre États existe et elle est prévue par l’article 8 dans les directives de

promotion des énergies renouvelables (c’était Silvio Berlusconi qui en 2008 avait exigé cela

sachant que l’Italie ne pouvait pas atteindre seule les objectifs invraisemblables proposés par

la commission), mais elle est marginale. Le Luxembourg ne parvient pas à s’engager sur la voie

des énergies renouvelables, car c’est un petit État. Le Luxembourg achète donc des droits

d’énergies renouvelables par exemple en Estonie ou au Danemark.

Mais la difficulté concerne les solutions technologiques. Il n’y a aucune nouvelle technologie

en matière d’énergies renouvelables. Aujourd’hui, les projets d’éoliennes se multiplient, mais il

n’y a pas de révolution sur cette technologie. Les éoliennes sont plus grandes, mais elles

coûtent plus cher et sont plus fragiles. Le coût d’entretien est aussi plus élevé. Les panneaux

solaires existent depuis très longtemps. Il n’y a pas de nouvelles solutions technologiques ;

toutes les solutions proposées existent depuis plusieurs décennies. Multiplier les installations

d’une même technologie ne constitue pas une rupture technologique, seule en mesure de

réduire les coûts prohibitifs des énergies renouvelables.

La seule solution serait de revoir le Pacte vert. Pour cela, il faut qu’il y ait une nouvelle

majorité à Strasbourg. Les citoyens doivent être sensibilisés pour ne pas qu’ils continuent à

voter comme avant, qu’ils arrêtent de croire les fausses promesses de l’écologie et de la classe

politique en matière d’environnement. Pratiquement tous les partis ont voulu croire au Pacte

vert. La future nouvelle majorité à Strasbourg doit avoir les pieds sur terre sur ces questions et

ces enjeux pour se détourner des objectifs irréalistes. Ce 29 février, les éditions L’Artilleur

publient mon livre « Énergies, mensonges d’État » dans lequel je dénonce ce qu’il faut bien

appeler des mensonges, par omission ou par ignorance, des « écolos de tous les partis ». Car

c’est là que réside le problème : tout le monde a cru que demain on raserait gratis et que l’on

se passerait facilement et à bon coût du gaz russe. Dès 1 955, les fondateurs de l’Union

européenne avaient déclaré que nous aurions besoin d’énergie abondante et bon marché.

Tant que l’on ne reviendra pas à cela, l’économie européenne continuera à être poussive par

rapport à celle du reste du monde qui ambitionne de vivre dans la prospérité basée sur

l’énergie abondante et bon marché, comme l’a démontré la COP 28 à Dubaï.

La Commission européenne poursuit ses objectifs démesurés en dévoilant un

mémorandum proposant de nouvelles cibles de réductions d’émissions de CO2 à

l’échéance 2040. En quoi cela démontre une nouvelle fois l’entêtement de la Commission

en matière de transition écologique et sur les énergies renouvelables ?

Cette étude d’impact est dramatique. En effet, le 6 février, la Commission européenne a

publié une étude d’impact de 605 pages proposant d’atteindre avec des mesures

coercitives, y compris sur l’alimentation, de décarboner 90 % de l’UE d’ici 2040 notamment en

proposant encore plus de mesures contraignantes pour atteindre 1 00 % d’énergie

renouvelable. Cela constitue encore une course folle. Les objectifs sont encore plus

démesurés. Cela est assez invraisemblable. Les États membres ne parviennent déjà pas à

atteindre les objectifs de 2030, figurez-vous ceux de 2040. J’espère que les élections du 9 juin

mettront fin à cette utopie qui ne peut conduire qu’à la décroissance.

La première partie de mon livre « Énergies, mensonges d’État » présente l’extraordinaire

développement de la politique énergétique européenne depuis 1 950 jusqu’en 201 6. Grâce à

elle nous avons vécu une période de prospérité, et de qualité de vie. Depuis 201 6, l’idéologie

verte a pris le pouvoir à Strasbourg et nous a conduit dans le marasme actuel. Il faut en sortir.

Ceci démontre que ce n’est pas les institutions qui sont en cause, mais les idéologies qui les

conduisent.


Le dernier livre de Samuel Furfari  est édifiant . Un pavé de 457 pages  que je conseille (je ne l'ai pas encore lu intégralement) 

Vous trouverez deux articles ci-joints qui évoquent ces sujets.


"L'éolien un mirage vert"

Jean Louis Butré s'exprime dans le JDD. Un excellent  article!

L’éolien : un mirage « vert » qui défigure nos paysages

TRIBUNE. L’éolien industriel envahit la France, laissant derrière lui un paysage ravagé et une population indignée. Malgré leur prétention à être une solution écologique, les éoliennes géantes se révèlent être une catastrophe pour l’environnement et notre héritage culturel, affirme Jean-Louis Butré*.                           

Jean-Louis Butré 19/03/2024 à 16:19, Mis à jour le 19/03/2024 à 19:12

Loin d’être des éléments architecturaux intégrés harmonieusement dans nos paysages, les éoliennes industrielles représentent une atteinte grandissante pour notre environnement et notre patrimoine historique. Trop souvent présentées comme des symboles de modernité et de développement durable et de symbole de l’écologie « verte » par ceux qui profitent financièrement de leur implantation, ces structures imposantes cachent en réalité une transformation paysagère catastrophique.

L’idée que les éoliennes peuvent être perçues comme des éléments architecturaux contemporains structurant nos paysages est une illusion. En réalité, leur présence en masse dénature nos territoires, les transformant en des zones industrielles électriques uniformes et oppressantes. Ces éoliennes géantes pouvant atteindre maintenant 230 mètres de haut imposent leur gigantisme et leur présence, cannibalisent l’espace, un bien commun, détruisant ainsi l’harmonie et la diversité de nos régions.

À fin 2023, la France comptait sur son territoire 1 765 sites opérationnels, comprenant 9 340 éoliennes, ce chiffre évolue, il y a 28 sites en construction, comprenant 144 nouvelles. Aucune étude officielle gouvernementale n’a été faite pour évaluer l’impact total du nouveau programme d’accélération des énergies renouvelables voulu par le président Macron qui consiste à implanter de l’ordre de 10 000 nouvelles terrestres.

Hervé Texier, vice-président de la FED et président l’Association Belle Normandie Environnement, constate que l’exaspération des habitants de la Normandie atteint son paroxysme face à la continuation du massacre éolien de leur paysage. Dans le pittoresque Bessin, la colère gronde. « Ras-le-bol ! », clament-ils haut et fort, dénonçant ces géants d’acier qui ne font que tourner dans le vent, coûtant une fortune aux contribuables, mettant en péril la faune aviaire et saccageant sans vergogne nos précieux paysages normands.

La tolérance envers ces monstres est désormais proche de zéro, à moins de verser discrètement quelques pots-de-vin. La révolte est palpable dans nos campagnes ! Un nouvel affront se dessine dans le Bessin : de nouveaux projets d’implantation de parcs éoliens sont en cours d’études. L’un au Manoir et l’autre à Tierceville. Ces éoliennes, mesurant entre 165 et plus de 200 mètres de haut, défient l’horizon, surpassant même la majesté de la cathédrale de Bayeux et les modestes hauteurs de Bricqueville »

La France est laissée en pâture aux opérateurs éoliens privés qui s’emparent sans vergogne de notre bien commun pour le défigurer

Le sujet touche la France rurale entière dans sa chair. Il y a une prise de conscience : la densité des installations est une problématique qui concerne une large portion du pays hors des villes. La Somme est le « champion » de la densité éolienne rurale. « On a transformé notre belle région en zone industrielle a déclaré une habitante : 400 mats dans un rayon de 20 km. On ne peut plus poser le regard sur un paysage sans avoir des éoliennes autour de soi, c’est devenu invivable ».

Pourtant, la France était un pays dont l’un des principaux atouts était sa variété de paysage et ses sites naturels préservés. L’Hexagone est aujourd’hui laissé en pâture aux opérateurs éoliens privés qui s’emparent sans vergogne de notre bien commun pour le défigurer. Leurs moyens financiers gigantesques, aidés par une administration aux ordres d’un pouvoir qui n’écoute plus la France rurale, leur permettent de s’implanter quasiment n’importe où au grand dam de territoires entiers voués à la désertification.

L’État a ouvert une boîte de Pandore : la raison impérative d’intérêt public majeur

L’éolien industriel représente aussi la plus grande menace pour notre patrimoine historique et notre identité culturelle. Les villages préservés historiques, les monuments prestigieux, sont progressivement engloutis par cette marée d’éoliennes. La diversité régionale qui faisait la fierté de notre pays est sacrifiée au nom du profit et de la soi-disant « transition énergétique » imposée par des décrets les déclarant de « Raison impérative d’intérêt public majeur », une nouvelle manœuvre gouvernementale pour passer par-dessus les lois.

La FED a déposé un recours en cassation pour faire annuler ce décret lamentable. 
Qu’il s’agisse par exemple des abords du château d’Amboise ou de sites classés au patrimoine mondial de l’UNESCO, rien n’arrête les promoteurs éoliens. En 2023, le Conseil d'État s’est interposé à 33 reprises contre les implantations de ces engins, ce qui représente un tiers des contentieux concernant l’éolien. On peut citer la préservation du site Unesco de Saint-Savin, la cathédrale de Chartres, ou la tour Auguste Perret à Amiens.

Dans la plupart des projets éoliens des régions rurales, les promoteurs, après avoir détruit les chemins creux et les arbres centenaires, proposent aux habitants de planter des haies de 3 à 4 mètres de haut, destinées à atténuer la vue d’éoliennes de 180 ou 230 mètres de hauteur. C’est dérisoire et cela témoigne du peu de considération pour l’environnement et pour la population qui vit en milieu rural.

Éoliennes en mer, ces géants d’acier émergeant des eaux

Les futures éoliennes en mer sont devenues, elles aussi, l’incarnation du saccage environnemental qui guette nos côtes, en particulier en face du magnifique littoral breton, comme la baie de Quiberon dans le Morbihan ou la presqu’île de Crozon dans le Finistère, des sites naturels de rêve enviés par le monde entier. Alors que la Commission nationale du débat public (CNDP) orchestre un simulacre de discussion publique s’étalant du 20 novembre 2023 au 26 avril 2024 le long des façades maritimes françaises, le paysage se dessine d’ores et déjà en un désastre annoncé.

Nathalie Beauzemont, administratrice de la FED et présidente de l’Association des gardiens du large, ajoute : « Sous le masque de la planification maritime, notamment dans le cadre de la stratégie éolienne en mer, le gouvernement vise à concrétiser les ambitions déclarées par Emmanuel Macron lors de son discours de Belfort en février 2022 : doter la France de 50 parcs éoliens en mer d'ici à 2050. Cependant, avec seulement 19 projets en cours ou en développement, le chemin à parcourir est colossal.

Cette surabondance est perçue comme une provocation, exacerbant l’indignation des habitants déjà aux prises avec l’éolien

Les cartes récemment dévoilées par l’État, présentées comme de simples outils de réflexion, révèlent une réalité brutale : le potentiel identifié de parcs éoliens en mer, dépasse largement les objectifs fixés. Cette surabondance a été perçue comme une provocation, exacerbant l’indignation des habitants et des associations déjà aux prises avec des projets éoliens. À Saint-Nazaire, à Saint-Brieuc, en Bretagne Sud, en Vendée, en Normandie, les communautés se voient confrontées à l’expansion sans limites de ces parcs, menaçant de transformer radicalement ce littoral magnifique, en des champs d’éoliennes ».

L’heure est à la révolte. Ces plans démesurés risquent d’être la goutte d’eau qui fera déborder le vase pour les habitants, indignés par le mépris manifesté à leur égard, par la transformation de leur territoire et la défiguration des paysages côtiers emblématiques, sacrifiés sur l’autel d’une politique énergétique discutable.

Impact inouï et caché des réseaux électriques indispensables pour l’éolien

L’impact visuel des éoliennes terrestres est seulement la partie émergée de l’iceberg. L’éolien industriel nécessite aussi la mise en place d’un réseau électrique gigantesque, parsemé de milliers de pylônes, de transformateurs et milliers de km de lignes haute tension, défigurant davantage encore plus l’environnement et menaçant la biodiversité de nos régions. Les conséquences écologiques de cette expansion incontrôlable sont désastreuses, avec des habitats naturels détruits et des espèces protégées menacées.

Il est urgent d’arrêter cette course aveugle vers une énergie prétendument « verte » qui détruit notre patrimoine et compromet notre avenir

Les chiffes récemment annoncées par le réseau de transport de l’électricité donnent le vertige : plus de 100 milliards d’investissements de réseaux électriques à ajouter à la facture d’électricité des ménages… Face à cette menace grandissante, les citoyens se mobilisent pour protéger leurs terres et leurs paysages. Il est urgent d’arrêter cette course aveugle vers une énergie prétendument « verte » qui détruit notre patrimoine et compromet notre avenir.

La Fédération environnement durable, avec ses 1 700 associations à travers la France, est en première ligne de cette lutte. Plus de la moitié des projets éoliens sont bloqués grâce à ses efforts notamment devant les tribunaux cours d’Appel et le Conseil d'État. Il est temps de dire non à l’éolien industriel, de protéger notre héritage culturel et naturel pour les générations futures. Unissons-nous tous pour défendre nos paysages, notre patrimoine et notre avenir !


 

Selon un rapport publié vendredi par la Cour des comptes, les acteurs des marchés de gros ont encaissé 30 milliards d'euros

de marges bénéficiaires nettes en 2022 et 2023.

Au détriment du consommateur et du contribuable

Comment le bouclier énergétique a profité aux fournisseurs d'électricité 

La Cour des comptes a publié ce vendredi son rapport sur les mesures exceptionnelles de lutte

contre la hausse des prix de l'énergie. Elle pointe les effets d'aubaine pour les producteurs,

fournisseurs et intermédiaires du marché de l'électricité. Ils auraient empoché 30 milliards

d'euros de marges bénéficiaires en 2022 et 2023.

Par Sébastien Dumoulin

Publié le 15 mars 2024 à 17:01Mis à jour le 15 mars 2024 à 18:01Face à la flambée des prix de l'énergie, l'Etat a mis les grands moyens pour protéger les consommateurs particuliers, entreprises et collectivités. Mais cette générosité a aussi largement profité aux producteurs,

distributeurs et intermédiaires du marché de l'électricité.

Selon un rapport publié vendredi par la Cour des comptes, ces acteurs des marchés de gros ont encaissé 30 milliards d'euros de marges bénéficiaires nettes en 2022 et 2023. Au détriment du consommateur et du contribuable.

Des risques d'effets d'aubaine

Le rapport, très touffu, des magistrats financiers, dresse un panorama exhaustif des multiples aides mises en place depuis trois ans pour éviter une explosion des factures d'énergie : remises sur le carburant à la pompe, boucliers tarifaires sur le gaz et l'électricité, chèques énergie… Il relève que, dans l'urgence, l'Etat a fait le choix de déléguer très majoritairement aux fournisseurs d'énergie la mise en oeuvre de ce soutien, à travers des baisses de prix imposées, avant d'être compensées par les finances publiques.

« Cette mise en oeuvre intermédiée pose question, souligne Pierre Moscovici, le premier président de la Cour. Notamment en raison des risques d'effets d'aubaine qu'elle a pu engendrer. En effet, la complète répercussion des soutiens publics, d'abord versés aux fournisseurs et distributeurs, n'est pas garantie pour les clients finaux. »

Les limites de la régulation

Ces « effets d'aubaine » dénoncés par la Cour proviennent d'une surcompensation par l'Etat des hausses de prix subies par les énergéticiens. En théorie, cet écart aurait pu bénéficier aux consommateurs - à travers des prix plus bas. Mais ce sont plus vraisemblablement les fournisseurs qui ont empoché la différence grâce à des recettes, augmentées des compensations versées par l'Etat, supérieures à leurs coûts d'approvisionnement. « C'est sans doute de ce côté-là que les choses se sont matérialisées », reconnaît Pierre Moscovici.

Comment un tel décalage a-t-il pu se mettre en place ? En premier lieu parce que l'envolée exceptionnelle des prix de gros au plus fort de la crise (multipliés par sept pour le gaz, par dix pour l'électricité) a malheureusement conduit à « voir les limites de la régulation » tricolore, explique Inès-Claire Mercereau, magistrate à la Cour des comptes.

Les mécanismes mis en oeuvre historiquement par la Commission de régulation de l'énergie (CRE) - à travers l'accès bon marché à des quotas de production électrique nucléaire à bas prix (ARENH) pour les concurrents d'EDF et la fixation de tarifs réglementés de vente (TRV) pour les consommateurs - n'ont pas permis de freiner efficacement la transmission des prix de gros aux prix de détail régulés.

Un nouvel impôt mal ficelé

Alors que la CRE est censée définir les TRV pour « refléter les fondamentaux des coûts de production nationaux, et notamment la compétitivité du parc nucléaire français », a rappelé Pierre Moscovici, ils s'en sont éloignés sensiblement - générant une manne financière conséquente pour le secteur.

Selon la Cour des comptes, « la somme des factures acquittées par les consommateurs et des prises en charge publiques de prix de détail excéderait globalement de près de 37 milliards d'euros la somme des coûts de production nationaux, des coûts commerciaux et des importations nettes sur 2022-2023 ».

Les pouvoirs publics étaient conscients de l'existence de ce trésor. Le législateur a donc cherché à mettre la main dessus, en instaurant en 2022 une « contribution sur les rentes inframarginales » (CRIM) visant les producteurs d'électricité. Mais ce nouvel impôt a été mal ficelé, selon les magistrats financiers. Au vu de son rendement très décevant (4,3 milliards d'euros attendus pour 2022-2023), le rapport invite fermement le Parlement à « en faire évoluer le champ et les modalités de calcul » pour 2024.

Le magot des traders

Une question reste en suspens : qui a mis la main sur le magot ? La Cour des comptes n'est pas en mesure de le dire avec certitude. « EDF, confronté à un problème de sous-production inattendu de son parc nucléaire a dû acheter de l'électricité sur les marchés et affichait une perte massive en 2022 . Ce qui veut dire que ce sont d'autres acteurs qui ont capté la rente », reconnaît un magistrat, qui pointe tout de même que la filiale « EDF Trading » du premier producteur tricolore a augmenté sa marge de plus de 5 milliards d'euros en 2022. « Cela donne une illustration du type de gains que certains acteurs du marché de gros ont pu engranger. »

Ce constat est d'autant plus cruel que les mesures de lutte contre la crise énergétique ont représenté un coût massif pour les finances publiques - dont la Cour des comptes vient de souligner la situation préoccupante dans son rapport annuel. Globalement, l'Etat a déboursé quelque 72 milliards d'euros depuis 2021 pour éviter que les factures d'électricité, de gaz ou de carburant n'étranglent les consommateurs. En net, le besoin de financement public est toutefois ramené à 36 milliards d'euros, soit la moitié, grâce aux rentrées fiscales induites en parallèle par la hausse des prix de l'énergie… un chiffre pas si éloigné des 30 milliards de marges empochés par les électriciens.


 

Yves Bréchet ex Haut Commissaire à l'énergie atomique s'exprime sur la consultation sur le nucléaire

Sommité dans le monde scientifique, (qui s'était exprimé sans langue de bois lors de la commission Schellenberger visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d'indépendance énergétique de la France)

La commission du débat public, ou la démocratie de façade

TRIBUNE. Gabriel Attal veut ouvrir un énième « Grand Débat » sur l’énergie. Yves Bréchet, ancien haut-commissaire à l’Énergie atomique et membre de l’Académie des Sciences, dénonce un déni de démocratie.

Par Yves Bréchet

Publié le 19/03/2024 à 07h00

Gabriel Attal veut ouvrir un  « Grand Débat » public sur la stratégie énergétique de la France. Un déni de démocratie pour Yves Bréchet, ancien Haut-commissaire à l’Énergie atomique et membre de l’Académie des Sciences.  © Utrecht Robin / Utrecht Robin/ABACA

Voilà que la dernière trouvaille en date pour les décisions concernant la politique énergétique est d'organiser un grand débat public, encore un, et d'en confier l'organisation à la CNDP (la Commission nationale du débat public), encore elle. Et bien sûr, tout cela sous prétexte de démocratie. Voilà une singulière façon de célébrer le cinquantième anniversaire du plan Messmer, qui devrait au contraire nous rappeler le courage et la fermeté nécessaires pour assurer la souveraineté énergétique du pays face à des difficultés pressantes, à l'époque la crise pétrolière, aujourd'hui le réchauffement climatique… Autres temps, autres mœurs.

Mais regardons d'un peu plus près cette procédure à l'aune des principes démocratiques dont elle prétend s'inspirer. « La CNDP est l'autorité indépendante garante du droit à l'information et à la participation du public sur l'élaboration des projets et des politiques publiques ayant un impact sur l'environnement. » Avec une pareille définition, on aurait toutes les raisons d'être optimiste…

Après tout, on s'est habitué à confondre le fait d'être concerné et le fait d'être compétent. Mais les décisions politiques sur des questions techniques doivent avoir également une légitimité politique, laquelle relève du fait d'être concerné, soit directement soit indirectement, par les conséquences de cette décision.

Le sens du bien commun

Si on ne pense qu'aux conséquences « locales et individuelles », on s'expose à une multiplication des NIMBY (« Not in my backyard », c'est-à-dire « je veux bien mais pas chez moi »), ou à l'illusion du WOFMIE (« working for me is enough », c'est-à-dire « si mes besoins sont remplis, le reste ne m'intéresse pas »)*. Cela vaut pour les éoliennes autant que pour les centrales nucléaires.

La perte du sens du bien commun conduit naturellement à ces dérives qui ne peuvent être contenues que par une information « systémique » des citoyens. Les pays nordiques, le Danemark en particulier, mettant en place la formation en amont du débat public, sont un exemple que nous serions bien inspirés d'imiter, à condition de le faire sérieusement.

Mais, sous réserve de ne pas violer les lois fondamentales (le principe de Carnot pour les machines thermiques, les lois de Kirchoff pour les réseaux, etc.), nous devons considérer que le public a un droit parfaitement légitime de participer au processus de décision. On pourrait espérer que ce travail d'instruction des dossiers, incluant la composante scientifique et technique, soit fait dans le cadre de la représentation nationale. 

Force est de constater qu'en l'état actuel des choses, cette approche ne convient pas : très peu de députés ont la capacité, ou même l'appétence, pour s'intéresser au versant technique des problèmes. Et quand bien même ils s'y intéresseraient, le « Conseil scientifique de l'OPECST » n'est certainement pas gréé pour l'aider : il serait plus efficace d'avoir un conseil scientifique restreint (par exemple en lien avec les Académies des sciences, des technologies, de médecine, d'agriculture…) qui pourrait mobiliser en tant que besoin des experts en activité pour analyser les dossiers. C'est exactement le mode de fonctionnement des conseillers scientifiques du président des États-Unis (l'Office Présidentiel pour la Science et la Technologie).

L'expérience a prouvé qu'une structure qui était très efficace du temps d'Obama s'est transformée en village fantôme sous Donald Trump, prouvant que le prérequis est l'intérêt porté par le décideur au contenu scientifique des dossiers. Le président de la République a récemment nommé un « conseil scientifique », mais la différence principale avec le conseil américain est le nombre de membres et les moyens alloués : le conseil américain comprend, sous la direction d'un scientifique de haute volée, une équipe d'une centaine d'experts qui instruisent les dossiers ou les font instruire, le conseil scientifique du président en France comprend une dizaine de scientifiques prestigieux certes, mais qui n'instruiront pas les dossiers, faute d'équipes opérationnelles pour le faire.

Des débats confisqués

Mais en fait la CNDP n'est pas là pour instruire techniquement les dossiers, elle est là pour informer et impliquer le public. Et c'est là justement que le bât blesse… Les participants à ces débats publics ne sont pas les citoyens dans leur ensemble, mais la plupart du temps des militants, militants d'une cause, ou « défenseurs de leur jardin ». Le format même des débats publics n'incite pas à une discussion approfondie et apaisée.

La raison en est simple : si dans une réunion de 200 personnes, 20 personnes souhaitent que le débat n'ait pas lieu, le débat est empêché. Il y a légion de tels exemples, le plus spectaculaire concernant le site de stockage des déchets nucléaires CIGEO. Si on faisait un débat public sur la protection du monstre du Loch Ness, vous pouvez être certains que les « convaincus » de l'existence du monstre s'exprimeraient massivement, sans que le « citoyen lambda » daigne se déplacer, et qu'une mesure de protection serait immédiatement validée par le recours à la vox populi !

Une autre raison relève de la plus simple réflexion qu'inspire le respect de nos concitoyens : si on veut débattre, il faut pouvoir écouter. Et ce ne sont pas les mêmes personnes qui prendront la parole dans un groupe de vingt personnes et dans un groupe de deux cents personnes. En conséquence de quoi, de par son fonctionnement même, la CNDP servira essentiellement de porte-voix aux militants, et non d'écoute des citoyens.

Le contraste avec l'approche des Suédois sur les déchets nucléaires est frappant : les ingénieurs en charge de ce projet allaient plusieurs soirs par semaine parler avec la population, et jamais à plus de vingt personnes. Cela prend du temps (une quinzaine d'années), mais le résultat est tout autre : une population que l'on a sincèrement écoutée et qui fait sienne la question posée. C'est là de la vraie démocratie, comme les pays nordiques savent la pratiquer.

Démocratie de façade

Par contraste, le débat public organisé par la CNDP est une démocratie de façade qui n'est pas une réponse honnête aux demandes légitimes des citoyens. Car enfin, nous sommes dans une démocratie représentative, nous élisons des députés pour faire ce travail. Si nous pensons que cette procédure ne convient pas, il y a dans la Constitution un outil de démocratie directe qui est le référendum. Il a le défaut de répondre rarement à la question posée, et de tourner souvent au plébiscite ou au désaveu de celui qui pose la question. Il faut la pratique de la démocratie suisse pour que cet outil remplisse sa fonction. Mais, au moins, cette consultation directe a une existence constitutionnelle, et donc une légitimité politique. Les débats publics de la CNDP n'en ont pas.

Le débat public est certainement une cote mal taillée : il n'a pas la légitimité de la délégation de souveraineté par l'élection, ni celle de l'expression directe de la voix populaire. Et il a pour effet principal de surreprésenter ceux qui sont particulièrement motivés pour la question, leur donnant de facto un poids dans la décision politique qui n'a aucune justification du point de vue de la légitimité politique. Le résultat est que cette procédure est l'outil idéal, soit pour servir de caisse de résonance aux convictions militantes, soit, pire encore, pour priver le Parlement de son rôle.

Mépris du Parlement

Car c'est bien là le cœur du problème. La Ve République n'est pas précisément connue pour être un régime parlementaire. Quand, par le hasard des urnes, l'exécutif est en délicatesse avec le Parlement, la stratégie naturelle est celle de l'évitement. La tentation pour un gouvernement d'utiliser le « débat public », soit pour éviter le désagrément de ne pas trouver une majorité au Parlement pour voter ses lois, soit pour justifier sa propension à procrastiner, n'est pas mince. Quitte d'ailleurs à s'asseoir ensuite sur les recommandations d'une « convention citoyenne » quand elles ne le satisfont pas, comme on l'a vu pour la convention sur le climat. Il n'y a pas de mal à cela, puisque ses recommandations n'engagent pas.

La multiplication des débats publics permet aussi de masquer le mépris dans lequel on tient le travail du Parlement. La commission Schellenberger-Armand sur la perte de la souveraineté énergétique de la France a fait un travail remarquable. Avec des recommandations précises au nombre de trente. Le règlement du Parlement donne la possibilité, si deux groupes parlementaires en font la demande, de nommer une commission pour suivre l'application ou la non-application des recommandations.

La première de ces recommandations était de penser la politique énergétique avec une stratégie sur une trentaine d'années. Le résultat de cette recommandation fondamentale est, d'une part, que les exercices futiles de PPE sur cinq ans se sont poursuivis comme si de rien n'était, et que ceux-là mêmes qui ne sont qu'un simulacre de stratégie ne sont pas même à l'agenda de l'assemblée. 

À ma connaissance, aucun groupe parlementaire, malgré des courriers de nombreux citoyens, n'a jugé bon de demander un suivi des recommandations de la commission Schellenberger-Armand. Le Parlement fait de façon exemplaire son travail d'analyse et, dans le même temps, renonce à sa prérogative d'en assurer le suivi. On est dans ce cas présent face à un exécutif qui ne respecte pas le Parlement, et à un Parlement qui ne se respecte pas lui-même. Un « grand débat public » devient alors un moyen « naturel » de masquer cette situation, ce qui ne laisse pas d'inquiéter.

Un tel débat public est en fait un déni de démocratie représentative sans être vraiment un exemple de démocratie directe. C'est un peu comme ces aumônes des comtesses douairières qui avaient leurs pauvres, laissant les gens dans la misère tout en se donnant bonne conscience.

*Dans la vase des acronymes, on a pu dire plaisamment que la conséquence de ces dérives est le syndrome BANANA (« Build Absolutely Nothing Anywhere Near Anybody »).

 

 

Quelques brèves

EXTRAIT

Bruno Le Maire et Roland Lescure sont en déplacement dans le Cotentin ce jeudi.

Il fallait bien deux ministres pour souligner l’importance de l’événement. Bruno Le Maire, ministre de l’Économie et Roland Lescure, ministre délégué chargé de l’Industrie et de l’Énergie, ont fait le déplacement jusqu’au site de La Hague d’Orano, en Normandie ce jeudi pour officialiser les décisions prises lors du conseil de politique nucléaire du 26 février.Ces choix sont stratégiques pour accompagner la relance du nucléaire en France, qu’il s’agisse de prolonger à 60 ans - et peut-être au-delà - la vie des réacteurs existants ou de construire au moins six EPR2, voire quatorze. Le CNP, présidé par Emmanuel Macron, a opté pour la poursuite au-delà de 2040 de la stratégie de traitement et de recyclage des combustibles nucléaires, y compris pour les nouveaux EPR. « Cette prolongation ira jusqu’à minima 2100, les EPR2 ayant une durée de vie de 60 ans ».La durée de vie des usines de retraitement des combustibles usés à La Hague sera étendue au-delà de 2040. «Le nucléaire c'est 200.000 emplois»



 Limpide, le directeur de l'économie du système électrique de RTE revient sur la méthode retenue pour calculer les coûts et explique que « sur 15 ans, rien que la production et la flexibilité représentent des montants d’investissements de + 300 milliards d’Euros... »


 

"L'économie allemande se trouve dans une phase dramatique" déplore l'économiste allemand Markus Kerber qui dénonce "la politique anti-industrielle" et "le moralisme totalitaire" des verts


 En Auvergne-Rhône-Alpes, Laurent Wauquiez coupe les vivres de l'éolien en faveur du solaire (La tribune Extrait 8 mars 24)

Le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes, Laurent Wauquiez, a annoncé ce vendredi l'arrêt « total » du financement de projets éoliens dans sa région. Ce, à travers le fonds d'investissement public-privé OSER, en vigueur depuis dix ans, dont la stratégie a été resserrée en direction de l'énergie solaire, à raison d'une recapitalisation de 12 millions d'euros.


Extrait IREF 13/3 « Vu d’Amérique l’Europe coule »

Dans une dépêche du 26 février, l’agence Reuters revient sur les maux qui semblent handicaper l’Europe face à la résilience américaine : l’électricité trois fois moins chère complique tout, de même que les gains de productivité sur longue période qui restent plus importants aux États-Unis qu’en Europe

 

Éolien en mer : quatre ONG attaquent l’État en justice

OUEST France le 12/3 EXTRAIT Quatre associations environnementales ont lancé un recours contre l’État lundi 11 mars 2024. Elles souhaitent que le gouvernement, très ambitieux sur le développement de l’éolien en mer, prenne bien davantage en compte les avis scientifiques.Le développement de l’éolien en mer continue de faire des remous. Après la publication polémique d’une carte de l’État sur les zones propices à l’accueil de futurs parcs, ce sont quatre associations environnementales qui tapent du poing sur la table.Ce lundi 11 mars 2024, Sea Shepherd France, Gardez les Caps, Défense des Milieux Aquatiques et Wild Legal lancent une procédure dite de recours en carence fautive. Elles attaquent ainsi l’État devant la justice, avec cette procédure déposée au tribunal administratif de Paris.Une technique qui a fait ses preuves. En 2021, l’État avait été condamné pour la première fois, dans le procès dit de « l’affaire du siècle », pour « inaction...

Extrait Boursorama mars 24

Trois des plus grands gestionnaires d'actifs financiers du monde, JP Morgan, State Street et BlackRock, ont annoncé quitter l'organisation Climate Action 100+, qui milite pour la prise en compte des objectifs climatiques par les entreprises.


SFEN infos le 19/3/24

Extrait _ Un nouveau programme de financement pour la recherche sur la fusion nucléaire a été annoncé par la ministre fédérale allemande de la Recherche, Bettina Stark-Watzinger, dans le but de préparer la construction du premier réacteur à fusion en Allemagne d’ici 2040.


TTSO 20/3/24 C’est la super bonne nouvelle annoncée ce matin par Christophe Béchu (Min. Transition écologique) : en 2023, les émissions de CO2 françaises ont diminué de 4,8% … quasiment autant que sur tout le quinquennat Hollande et pas loin de l’objectif à tenir pour atteindre la neutralité carbone en 2050 (-5%/an). Surtout -- selon le ministre --  la preuve que "la planification écologique commence à produire des effets" ! Sans doute mais selon Citepa (l’organe chargé d’estimer nos émissions), la baisse actuelle s’explique "principalement" par des "facteurs conjoncturels". En clair : la crise énergétique qui a limité la production industrielle, l’inflation qui a forcé les Français à baisser le chauffage et le rétablissement de notre production nucléaire après la cata de 2022. De quoi être un peu Béchu (ok on sort).




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