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Atteinte à la valeur des biens

http://www.ventdebout.info/2021/05/tribunal-de-nantes-les-eoliennes-font.html

Pour la première fois en France, le tribunal Administratif confirme le lien entre l’industrialisation d’une zone rurale par l’éolien, les nuisances environnementales des éoliennes, et la baisse de valeur d’une habitation. (TA Nantes n°1803960 18 dec.2020). 

Par jugement en date du 18 décembre 2020, devenu définitif, le tribunal administratif de Nantes a apporté une appréciation sur les nuisances que peut produire l’implantation d’éoliennes à partir d’une demande portant sur la réduction du coefficient de situation et la révision de la valeur locative d’un logement et par voie de conséquence sur la réduction correspondante des cotisations de taxe foncière.

C’est donc à partir d’un simple contentieux fiscal que la juridiction administrative a été conduite à porter une appréciation sur les inconvénients que présente l’installation d’éoliennes à proximité de bâtiments d’habitation.

Le juge administratif retient en effet que l’immeuble des requérants « subit des nuisances visuelles et sonores spécifiques à leur propriété, occasionnées par la présence des éoliennes qui sont implantées à moins de mille mètres de leur domicile et dans une situation de covisibilité directe » et qu’il s’agit d’« inconvénients » dont l’administration fiscale doit tenir compte.

Les motifs de ce jugement sont d’une grande clarté et apportent des éléments permettant de s’opposer juridiquement aux futurs arrêtés préfectoraux autorisant l’implantation d’éoliennes près d’immeubles d’habitation à moins de 1 000 m. 

Dans le cas où les annulations de tels arrêtés ne seraient pas obtenues, cette jurisprudence doit permettre aux propriétaires de biens proches d’éoliennes de demander des dommages et intérêts aux sociétés exploitantes des parcs éoliens en indemnisation des préjudice subis.

La Fédération Environnement durable a également publié un communiqué sur l'importance de ce jugement,

FED :

Communiqué de presse

Le 20/04/2021

Les éoliennes entrainent officiellement la baisse de l’impôt foncier.

Pour la première fois en France, un Tribunal Administratif confirme le lien entre l’industrialisation d’une zone rurale par l’éolien, les nuisances environnementales des éoliennes, et la baisse de valeur d’une habitation. (TA Nantes n°1803960 18 dec.2020).

Soutenus par la Fédération Environnement Durable des riverains des éoliennes de Tigné, dans le Maine et Loire, regroupés dans l’association Tigné préservé, présidée par Bernadette Kaars, ont demandé en 2018 au centre des impôts de Saumur de constater la détérioration de leur environnement et de leur accorder la baisse de taxe foncière correspondante.

Ils ont porté le dossier devant le tribunal administratif de Nantes qui, par décision du 18 décembre2020, leur a donné raison. Notamment sur les points suivants :

- Les éoliennes sont bien un motif de déclassement fiscal.

- Les éoliennes ont un impact négatif sur la valeur des biens des riverains.

- Les nuisances environnementales des éoliennes sont reconnues pour les particuliers comme elles l’étaient déjà pour les collectivités locales

Ce Jugement historique concerne non seulement les centaines de milliers de riverains des parcs éoliens actuels mais aussi toutes les futures victimes des nouveaux parc prévus par le

gouvernement selon la programmation pluriannuelle de l’énergie( PPE) dont le pivot est de doubler voire tripler le nombre d’éolienne terrestres existantes

Ce jugement du Tribunal de Nantes balaye les déclarations des promoteurs éoliens, relayées par le Ministère de l’environnement et l’agence du Maitrise de l’énergie (ADEME) qui depuis des années déclarent que les éoliennes n’ont pas d’impact sur les biens des riverains.

La Fédération Environnement Durable va informer les 1500 associations adhérentes de toutes les régions rurales de France pour qu’ils demandent que les mêmes mesures fiscales leurs soient accordées La FED en informera aussi tous les maires ruraux, les notaires et les agences immobilières.

 

Questions au Sénat

http://www.senat.fr/questions/base/2021/qSEQ210623425.html

Prise en compte de l'implantation d'éoliennes dans le calcul de la taxe foncière acquittée

15e législature

Question écrite n° 23425 de M. Hervé Maurey (Eure - UC)

publiée dans le JO Sénat du 24/06/2021 - page 3909

M. Hervé Maurey attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics sur la prise en compte de l'implantation d'éoliennes dans le calcul de la taxe foncière acquittée par les propriétaires riverains.
Dans son jugement du 18 décembre 2020, le tribunal administratif de Nantes a estimé fondée la demande de propriétaires d'une révision à la baisse de la valeur locative de leur bien, et donc du montant de la taxe foncière acquittée, à la suite de l'installation d'éoliennes à proximité de leur propriété, que l'administration refusait d'appliquer. Le tribunal a ainsi estimé que la présence d'éoliennes qui sont implantées à moins de mille mètres de l'habitation et dans une situation de covisibilité directe engendre des nuisances visuelles et sonores spécifiques à l'habitation (TA Nantes, n°1803960, 18 décembre 2020). L'État n'a pas interjeté appel de ce jugement.
Cette décision interroge sur la bonne prise en compte des nuisances causées par les éoliennes dans le calcul de la valeur locative des biens à proximité de ces infrastructures.
Aussi, il souhaiterait connaître si les services des finances publiques prennent bien en compte ces infrastructures dans le calcul de la valeur locative des biens à proximité et, dans le cas contraire, s'il a évalué la conséquence d'une application de cette décision à l'ensemble de ces biens. Enfin, il lui demande s'il compte améliorer l'information des élus sur l'impact en matière de ressources fiscales de l'implantation d'éoliennes lorsqu'un projet est soumis pour avis au conseil municipal.

 

Réponse du Ministère auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance - Comptes publics

publiée dans le JO Sénat du 07/10/2021 - page 5761

L'article 1517 du code général des impôts (CGI) prévoit qu'il est procédé annuellement à la constatation des constructions nouvelles, des changements de consistance ou d'affectation, ainsi que des changements de caractéristiques physiques ou d'environnement. L'article 1415 du même code prévoit que la taxe foncière est établie au regard des éléments existants au 1er janvier de l'année de l'imposition. L'article 324 R de l'annexe III au CGI précise que la valeur locative des locaux à usage d'habitation intègre un coefficient de situation qui permet de tenir compte de la situation du bien dans son environnement géographique. Ce coefficient permet ainsi de tenir compte des inconvénients auxquels sont exposées les propriétés, et qui seraient susceptibles d'influer sur leur valeur locative. Il existe ainsi cinq valeurs de coefficient (+0,10 ; + 0,05 ; 0 ; -0,05 et -0,10) pour affiner, si besoin, la valeur locative du bien en la majorant ou en la minorant. Les nuisances visuelles et sonores spécifiques à l'habitation résultant de l'installation d'éoliennes sont prises en compte pour fixer ce coefficient de situation. Toutefois, il est précisé que la constatation d'une nuisance n'entraîne pas automatiquement l'application d'un coefficient minorant. En effet, constitué de la somme algébrique de deux coefficients de situation – générale au sein de la commune et particulière au sein de l'environnement proche – sa fixation procède d'une appréciation globale de la situation de l'immeuble, les inconvénients constatés pouvant être compensés par les avantages résultant de cette situation. Les avantages et les inconvénients doivent être appréciés globalement, et les compensations nécessaires opérées pour dégager un jugement d'ensemble. Les avantages s'entendent par exemple de la présence de larges voies d'accès et d'espaces immédiats, très bien aménagés, offrant un agrément certain et des commodités particulières. La détermination de la valeur du coefficient de situation particulière nécessite donc une appréciation au cas par cas. Enfin, conformément à l'article 1505 du CGI, la mise à jour de la valeur locative induite par la modification du coefficient, à la hausse comme à la baisse, est soumise pour avis à la commission communale des impôts directs qui est présidée par le maire ou par un adjoint délégué assurant ainsi l'information des élus sur les modifications opérées et leurs conséquences en matière de base d'imposition pour les collectivités locales concernées.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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La Jurisprudence de la Cour de Cassation  reconnaît implicitement la  baisse de valeur de 10 à 20%

Cass. Civ 3, 17.9.2020, C 19-16.937

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 26 mars 2019), les consorts P... ont, après expertises ordonnées en référé, assigné la société Parc éolien de Roman en réparation des préjudices occasionnés par l'installation, à proximité des résidences secondaires dont ils sont propriétaires, d'éoliennes générant, selon eux, des troubles anormaux du voisinage.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. Les consorts P... font à l'arrêt de rejeter leurs demandes, alors :

« 1°/ que nul ne doit causer à autrui un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage ; que la cour d'appel a approuvé les conclusions de l'expert constatant qu'il existait un trouble paysager en accédant aux propriétés voisines du parc éolien de Roman pouvant avoir une conséquence lors d'une revente éventuelle et que les propriétaires subissaient donc un préjudice du fait d'une atteinte à l'environnement général dans lequel se situait leurs biens se traduisant par une difficulté à trouver des acquéreurs potentiels de ceux-ci ou une diminution de leur valeur vénale qu'il a évaluée à une décote de 10 % à 20 % ; qu'en excluant cependant par principe l'existence d'un trouble anormal du voisinage au prétexte erroné que les modifications apportées à l'environnement du bien ne pourraient donner lieu à réparation faute de droit acquis à le conserver, la cour d'appel a violé, par refus d'application, le principe susvisé ;

2°/ que nul ne doit causer à autrui un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage ; que la cour d'appel a approuvé les conclusions de l'expert constatant qu'il existait un trouble paysager en accédant aux propriétés voisines du parc éolien de Roman pouvant avoir une conséquence lors d'une revente éventuelle et que les propriétaires subissaient donc un préjudice du fait d'une atteinte à l'environnement général dans lequel se situait leurs biens se traduisant par une difficulté à trouver des acquéreurs potentiels de ceux-ci ou une diminution de leur valeur vénale qu'il a évaluée à une décote de 10 % à 20 % ; qu'en excluant que ce préjudice ait pu caractériser un trouble anormal du voisinage au prétexte indifférent qu'il trouvait son origine dans l'exploitation d'une activité qui relevait de l'intérêt général, la cour d'appel a derechef violé le principe susvisé ;

3°/ que l'existence d'un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage est appréciée in concreto ; que, pour exclure tout trouble anormal du voisinage, la cour d'appel s'est encore bornée à constater que les propriétaires évaluaient l'ensemble des préjudices visuels subis en raison de la présence à proximité de leurs biens du parc éolien (préjudice visuel depuis leur propriété, difficulté à revendre et perte de valeur vénale) à un montant supérieur à celui retenu par l'expert fixant la perte de valeur vénale des propriétés à un montant des moins négligeables, compris entre 10 et 20 %, pour le seul préjudice paysager sur le chemin d'accès aux propriétés entraînant une difficulté à revendre les biens ; qu'en statuant, sans apprécier elle-même l'importance de ce préjudice et donc sans rechercher s'il caractérisait un trouble anormal au regard de son impact pour les consorts P..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe susvisé. »

Réponse de la Cour

4. Se fondant sur les rapports d'expertise, ainsi que sur un constat d'huissier de justice, la cour d'appel a, par motifs propres et adoptés, constaté que le volume des émissions sonores générées par les éoliennes, de nouvelle génération, était, de jour comme de nuit, inférieur aux seuils prévus par la réglementation en vigueur et que le bois situé entre les propriétés et le parc éolien, installé à distance réglementaire des habitations, formait un écran sonore et visuel réduisant les nuisances occasionnées aux habitants d'un hameau, certes élégant et paisible, mais situé dans un paysage rural ordinaire.

5. Ayant retenu à bon droit que nul n'a un droit acquis à la conservation de son environnement et que le trouble du voisinage s'apprécie en fonction des droits respectifs des parties, elle a estimé que la dépréciation des propriétés concernées, évaluée par expertise à 10 ou 20 %, selon le cas, dans un contexte de morosité du marché local de l'immobilier, ne dépassait pas, par sa gravité, les inconvénients normaux du voisinage, eu égard à l'objectif d'intérêt public poursuivi par le développement de l'énergie éolienne.

6. Elle a souverainement déduit de ces motifs que les consorts P... ne justifiaient pas d'un trouble anormal du voisinage.

7. Le moyen n'est pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. et Mme P... et Mme E... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept septembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SARL Meier-Bourdeau Lécuyer et associés, avocat aux Conseils, pour M. et Mme P... et Mme E...

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté M. et Mme P... et Mme E... de leurs demandes ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE, sur le préjudice de perte de valeur des propriétés, les appelants sollicitent des indemnités de 194 000 € pour les plus proches, les consorts W... O..., de 178 000 € pour les époux P... et de 113 925 € pour les époux H..., plus distants, correspondant respectivement, par rapport aux valeurs des propriétés retenues par l'expert abstraction faite des éoliennes, à 45 %, 40 % et 35 % de perte de valeur ; que ce préjudice a fait l'objet d'une étude très approfondie de la part de l'expert immobilier, M. V..., qui n'hésite pas à parler de « pollution » visuelle du fait de l'existence des éoliennes (terme qu'il retire ensuite pour le cas d'espèce à la suite d'un dire du conseil des intimés) et à admettre que d'une manière générale l'installation d'un parc éolien fait perdre de la valeur aux propriétés voisines, qui se vendent moins bien et/ou moins cher ; que l'expert s'est rendu deux fois sur place visiter avec soin les maisons, leurs dépendances et leurs jardins, analyser les travaux de modernisation dont elles avaient fait l'objet, indiquer la distance des habitations à l'éolienne la plus proche (de 569 m pour les consorts W... O... à 1167 m pour les époux H...), prendre toutes les photos utiles, rectifier ses premières descriptions sur les dires des parties, se renseigner sur le marché immobilier local et sur les 13 dernières transactions les moins anciennes, interroger le notaire local ; qu'apprécier la perte de valeur, sa mission, dépend des inconvénients concrets provoqués par les éoliennes ; que, pour sa part, il n'a entendu aucun bruit, mais la chose peut varier selon le vent, le feuillage des arbres, etc., et il a attendu à juste titre les mesures faites par M. U... pour conclure ; qu'il n'a pas de peine à estimer l'impact visuel dont chacun peut se faire une idée à partir des photos ; que ses constatations et photographies sont utilement complétées par celles qui figurent au constat de Me Y... du 19 septembre 2011 qui décrit la situation sonore et visuelle au niveau des 3 propriétés, [...] (où un bruit de chantier l'a empêché d'apprécier le bruit au niveau de cette propriété) et sur la route qui mène au hameau, ainsi que par celles produites par les appelants, pièces 29, 29 bis et 38, qui ont le mérite de faire prendre conscience d'une impression de présence proche ; que les trois propriétés sont à distance réglementaire des éoliennes, plus de 500 m ; qu'elles sont protégées de la vue par le bois de [...] ; que depuis l'habitation de M. et Mme P..., l'impact visuel des éoliennes est « très faible » (p. 10 et p. 15), on peut apercevoir par intermittence le haut d'une pale dans le jardin mais pas dans la maison ; que depuis la maison des H..., située à 1167 m de l'éolienne la plus proche, il estime qu'il n'y a pas d'impact visuel direct « sauf quand on arrive en voiture par la route », « la seule vue sur une éolienne est à partir du fond du jardin derrière la maison » (p. 11) « que ce soit au mois d'avril ou au mois de juillet » (p. 16) ; quant à la vue des éoliennes à partir de la propriété de M. Q..., même chose, elles sont bien visibles quand on vient par la route, mais la vue est très limitée, uniquement dans le jardin (p. 12, 15, 18, 22), pas de l'intérieur de la maison ; que le hameau est élégant et paisible, mais le paysage rural à l'entour est ordinaire ; qu'en conclusion, l'expert constate (p. 42) : « - que l'impact auditif, n'a pas été constaté lors de nos visites, mais qu'il peut être augmenté en l'absence de feuillage, - que l'impact visuel est inexistant l'été avec le feuillage aux arbres pour les trois propriétés ; - que l'impact visuel est plus important sous certaines conditions de saison et d'ensoleillement à partir de la propriété Q... ; - qu'il existe un trouble paysager en arrivant d'un côté ou de l'autre du chemin communal à partir de l'extérieur des propriétés pouvant avoir une conséquence et un préjudice lors d'une revente éventuelle ; - le préjudice est celui causé dans l'environnement paysagé général bien que ce ne soit pas une gêne particulière et directe, il peut se traduire par un refus d'éventuels acquéreurs réfractaires à cet environnement ou une baisse du prix de vente, seul facteur décisif » ; qu'il prend en compte un désistement sur un compromis en 2010 et l'avis du notaire, Maître N... (p. 45), qui impute la tendance baissière du marché à l'apathie du marché local, sans vouloir exclure l'influence des éoliennes, les particularités de chacune des propriétés, pour admettre une certaine dévaluation de la valeur des trois propriétés, qu'il chiffre respectivement à 20 % pour celle de M. Q..., 10 % pour celle de M. et Mme P... et 10 % pour celle de M. et Mme H... (pp. 48-49) ; qu'on est très loin des proportions soutenues par les appelants ; qu'il n'y a pas de droit acquis à la conservation de son environnement (en ce sens Civ. 3e 21 octobre 2009, Revue de Droit Immobilier 2010, p. 161) et l'appréciation du trouble anormal de voisinage se fait en fonction des droits respectifs des parties (Civ. 3e 20 décembre 2000, pourvoi n° 98-15.024) ; qu'en l'espèce, il y a lieu de tenir compte de l'intérêt général reconnu dans la jurisprudence du Conseil d'Etat qui, par interprétation de divers textes, estime que les éoliennes présentent un intérêt public tiré de leur contribution à la production d'électricité ; qu'il y a donc lieu d'approuver le travail et les conclusions de l'expert ; que la juridiction d'appel en tire la conclusion juridique qu'on ne saurait admettre en l'espèce que le parc éolien de Roman constitue pour chacune des trois propriétés, du point de vue de la perte de valeur vénale, un trouble qui dépasse, par sa gravité, les inconvénients normaux de voisinage ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE l'expert V... spécialiste en estimations immobilières désigné par ordonnance de référé du 09 novembre 2011, s'est déplacé à deux reprises sur le site où sont situées les propriétés des parties demanderesses en avril 2012 et en juillet 2013 ; que s'agissant de la propriété de Monsieur Q..., la plus proche du parc éolien, l'expert a constaté qu'il était possible d'apercevoir deux éoliennes à l'entrée de la propriété, à une cinquantaine de mètres de la maison ainsi que « légèrement » à partir des fenêtres de l'étage, celui-ci précisant que la vue portait sur le sommet des pâles ; qu'il conclut à un impact visuel faible au printemps, et nul durant la saison estivale tant devant la maison que sur la terrasse d'agrément ou encore de l'étage ; que s'agissant de la propriété des consorts P..., l'expert indique qu'il n'y a pratiquement aucune vue sur les éoliennes, seul le haut d'une pale étant visible si tant est que l'on prenne du recul mais uniquement à l'extrémité d'une terrasse, côté nord, et sous réserve de « rechercher l'éolienne » ; que, pour la propriété de Monsieur et Madame H..., la plus éloignée, Monsieur V... conclut à l'absence d'impact visuel direct, les éoliennes n'étant pas visibles de la maison, ni de la terrasse ou de la piscine, seul le haut d'une pale étant perceptible à partir du fond du jardin ; qu'en outre toutes les habitations sont protégées par un écran végétal constitué par le bois de la [...] ; que l'effet stroboscopique invoqué n'a pas été repris dans les conclusions expertales ; qu'il en résulte que l'impact visuel direct des éoliennes sur les propriétés des demandeurs est tantôt faible (propriété Q..., uniquement durant le printemps), tantôt très faible (propriété P...), tantôt inexistant (propriété H...) et n'est donc pas constitutif d'un trouble anormal de voisinage ; que l'expert fait état d'un préjudice de jouissance qui découlerait de la seule présence des aérogénérateurs à proximité des habitations et dont l'effet se ferait ressentir lors d'une revente éventuelle, les acquéreurs potentiels, confrontés visuellement à ces dispositifs à l'approche du hameau de la [...], étant susceptibles d'être dissuadés dans leur projet d'achat ; qu'il évoque les aspects émotionnels liés à une vente et leur rôle majeur dans la réalisation d'une transaction immobilière ; qu'il met en exergue la qualité des bâtiments qu'il situe dans le haut de gamme des biens immobiliers et l'exigence corrélative des acquéreurs ; que toutefois, il est constant que nul n'est assuré de conserver intact son environnement et qu'il n'existe pas de droit acquis à la permanence de la vue qu'un propriétaire peut avoir de son fonds ; que l'expert lui-même précise le caractère totalement subjectif de l'impact visuel que peut avoir la présence d'une éolienne en ce qu'il déclare « que tout le monde n'est pas affecté de la même façon part leur présence » ; qu'en outre, il décrit le site d'implantation des éoliennes environnant les habitations des demandeurs comme étant constitutif d'un paysage qu'il qualifie de « rural » mais sans présenter de caractère remarquable ou préservé et dont il dénie toute spécificité particulière ; qu'il relève par ailleurs la présence à proximité du site de poteaux électriques à haute tension ; qu'il convient de noter que ces objets de grandes tailles et de caractère industriel sont propre à dénaturer le paysage ou du moins à en atténuer l'aspect « préservé » ; que la responsabilité fondée sur le trouble anormal du voisinage suppose que soit rapportée la preuve d'un trouble qui excède les inconvénients ordinaires du voisinage ; que cette définition suppose l'existence d'un trouble qui présente un certain caractère de gravité, les inconvénients « normaux » n'ouvrant pas droit à réparation ; que tel n'est pas le cas en l'espèce, l'expert invoquant tout au plus un impact visuel direct faible en ce qu'il est conditionnel (seulement des fenêtres de l'étage de la maison et encore de l'extrémité d'une terrasse, côté nord et sous réserve de « rechercher l'éolienne »), partiel (juste le sommet des pales) ou temporaire (durant le printemps) ; que ce dernier parle le plus souvent d'impact direct inexistant ; que la preuve d'un impact indirect découlant de la seule proximité du parc éolien des habitations des consorts Q..., P... D... et H...-E... n'est pas établie ; qu'ils seront ainsi déboutés de leur demande d'indemnisation fondée sur le trouble anormal du voisinage lié aux nuisances visuelles alléguées ;

1°) ALORS QUE nul ne doit causer à autrui un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage ; que la cour d'appel a approuvé les conclusions de l'expert constatant qu'il existait un trouble paysager en accédant aux propriétés voisines du parc éolien de Roman pouvant avoir une conséquence lors d'une revente éventuelle et que les propriétaires subissaient donc un préjudice du fait d'une atteinte à l'environnement général dans lequel se situait leurs biens se traduisant par une difficulté à trouver des acquéreurs potentiels de ceux-ci ou une diminution de leur valeur vénale qu'il a évaluée à une décote de 10 % à 20 % ; qu'en excluant cependant par principe l'existence d'un trouble anormal du voisinage au prétexte erroné que les modifications apportées à l'environnement du bien ne pourraient donner lieu à réparation faute de droit acquis à le conserver, la cour d'appel a violé, par refus d'application, le principe susvisé ;

2°) ALORS QUE nul ne doit causer à autrui un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage ; que la cour d'appel a approuvé les conclusions de l'expert constatant qu'il existait un trouble paysager en accédant aux propriétés voisines du parc éolien de Roman pouvant avoir une conséquence lors d'une revente éventuelle et que les propriétaires subissaient donc un préjudice du fait d'une atteinte à l'environnement général dans lequel se situait leurs biens se traduisant par une difficulté à trouver des acquéreurs potentiels de ceux-ci ou une diminution de leur valeur vénale qu'il a évaluée à une décote de 10 % à 20 % ; qu'en excluant que ce préjudice ait pu caractériser un trouble anormal du voisinage au prétexte indifférent qu'il trouvait son origine dans l'exploitation d'une activité qui relevait de l'intérêt général, la cour d'appel a derechef violé le principe susvisé ;

3°) ALORS QUE l'existence d'un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage est appréciée in concreto ; que, pour exclure tout trouble anormal du voisinage, la cour d'appel s'est encore bornée à constater que les propriétaires évaluaient l'ensemble des préjudices visuels subis en raison de la présence à proximité de leurs biens du parc éolien (préjudice visuel depuis leur propriété, difficulté à revendre et perte de valeur vénale) à un montant supérieur à celui retenu par l'expert fixant la perte de valeur vénale des propriétés à un montant des moins négligeables, compris entre 10 et 20 %, pour le seul préjudice paysager sur le chemin d'accès aux propriétés entraînant une difficulté à revendre les biens ; qu'en statuant, sans apprécier elle-même l'importance de ce préjudice et donc sans rechercher s'il caractérisait un trouble anormal au regard de son impact pour les consorts P..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe susvisé.ECLI:FR:CCASS:2020:C300606

 

 

II. L’apport de l’arrêt de la cour de cassation du 17 septembre 2020

Soyons clair d’emblée : par cette décision la Cour de Cassation n’a posé aucun principe d’exclusion des parcs éoliens du champ des troubles anormaux de voisinage. Elle s’est contentée, tout au plus, de confirmer une appréciation de l’espèce dont on peut au mieux tirer quelques conséquences pour l’avenir. En d’autres termes : un parc éolien peut toujours générer un trouble anormal de voisinage, ce qui s’apprécie en justice en fonction des circonstances propres à chaque dossier.

Dans cette affaire, le litige portait sur l’installation d’un parc éolien à proximité d’une maison d’habitation dont les propriétaires ont estimé subir un préjudice. Pour prouver la réalité du dommage, ils ont dépêché un huissier pour constat et ont fait diligenter une expertise judiciaire.

L’Expert a conclu, dans son rapport, au constat que les émissions sonores de l’installation étaient inférieures aux seuils réglementaire (il s’agissait d’éoliennes nouvelle génération), que le parc était à distance réglementaire de la propriété et qu’un bois entre le parc et la maison formait un « écran sonore et visuel réduisant les nuisances occasionnées aux habitants d'un hameau, certes élégant et paisible, mais situé dans un paysage rural ordinaire. »

La dépréciation immobilière a été estimée de l’ordre de 10 à 20 %, ce que l’expert a considéré comme ne dépassant pas les inconvénients normaux de voisinage dès lors que le développement de l’éolien répond à un objectif d’intérêt général et que le marché de l’immobilier était déjà en berne au niveau local.

Sur ce, la cour d’appel d’Amiens a rappelé que :

  • nul n’a de droit acquis à la conservation de son environnement (principe déjà acquis en droit et qui n’empêche pas la caractérisation du trouble de façon absolue) ;

  • « le trouble du voisinage s'apprécie en fonction des droits respectifs des parties », formulation de la cour d’appel qui renvoie à l’impératif d’appréciation objective des troubles.

 

La cour a entériné le rapport d’expertise et a donc écarté la caractérisation du trouble. La Cour de cassation n’a fait que confirmer cette appréciation.

Il n’y a donc aucune règle qui viendrait empêcher l’action en trouble de voisinage contre les parcs éoliens. L’affaire dont la Cour de cassation a été saisie n’a fait que mettre en jeu la balance des intérêts selon la technique classique de jurisprudence. En d’autres termes, la solution serait toute autre si on modifiait certain des paramètres de ce litige : si le parc éolien avait été plus visible, si la dévaluation immobilière avait été évaluée à plus de 20 %, ou encore si le contexte immobilier local avait été plus prospère, il n’est pas certain que les juges auraient rendu le même jugement. 

Quant au fait que l’éolien répond à un objectif d’intérêt général, c’est un poids dans la balance en faveur des promoteurs, certes, mais il ne ferme certainement pas la porte aux actions en dommages et intérêt. C’est, au reste, une affirmation de plus en plus discutable, et que votre serviteur ne se lassera pas de discuter. 

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